Out Of Order, version restaurée 4K, en BLU-RAY chez Carlotta

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Emprisonnés dans un ascenseur en panne, trois hommes et une femme à l’image d’une société au bord de la crise de nerf.

Ne supportant pas d’attendre l’arrivée des secours, trois hommes et une femme bloqués dans un ascenseur vont prendre tous les risques possibles pour s’en extraire. Premier film -et surement le plus réussi- de de Carl Schenkel, Out of Order, s’inscrit dans un registre anxiogène proche de celui Michael Haneke;  à partir d’une situation banale qui se dérègle étrangement se la névrose de ses personnages et par extension les dysfonctionnements d’une société.

Musique stridente rythmée comme des battements de cœur, menace extérieure en embuscade -soulignée par un point de vue situé hors-champ, la mise en place reprend les codes d’un thriller  à la sauce John Carpenter, qui avec Christine -sortie quelques mois plus tôt- avait réussi à transformer un autre objet du quotidien- une voiture- en une diabolique machine meurtriere. Les rares plans tournées vers l’extérieur, des rues vides à la géométrie cloisonnante renforce l’impitoyable isolement. Autre clin d’œil de Schenkel au genre horrifique, Les Dents de la mer (Steven Spielberg, 1975) lorsque les portes de l’ascenseur qui, telles les mâchoires d’un requin manquent de happer le dénommé Pit (Hannes Jaenicke).

Mais, une fois le quatuor bien bloqué dans sa cage, on quitte le cinéma de genre pour une dramaturgie pure. Fini les effets de style -la musique disparait également-, l’attention se dirige vers la psychologie des personnages. L’enjeu de la mise en scène étant d’organiser les six petits mètres carrés de la scène en différents espaces de conflits et d’intimité. Provocations, tentatives d’association, confidences, les relations révèlent le psyché de chaque prisonnier. Révélation de leur passé, mais surtout d’un futur sans avenir. Car l’immobilisme accidentel de cette situation incongrue n’est que la métaphore leur situation professionnelle. Marion (Renée Soutendijk)destinée à n’être considérée que pour son physique, le comptable (Wolfgang Kieling) qui ne pourra pas suivre le rythme des progrès informatiques, Pit qui multiplie les petits boulots pour survivre, et,  Jörg (Götz George) qui a perdu toute sa légitimité auprès de son équipe. L’ascenseur social est bloqué pour une société allemande qui a souvent prétendu le contraire pour louer son modèle économique aussi bien à l’intérieur de ses frontières que pour le reste du monde.

Parabole bien huilée, Out of Order, tire son efficacité de ses dialogues finement ciselés et de sa grande qualité d’interprétation. L’accès à un deuxième espace-le haut de la cabine au cœur de la machinerie générale- permet d’éviter toute monotonie, et ouvre un nouveau terrain de conflit vertigineux et beaucoup plus inquiétant dans portée. Sans être des témoins directs de l’affrontement physique sans merci auquel vont se livrer les deux mâles alpha (Pit et Jörg), l’homme et la femme resté en sécurité dans la cabine ne vont pas manquer de condamner « le rescapé » sans aucune forme de procès. Une situation rappelant le passé belligérant peu glorieux et sombre du pays.

 

Sous la forme d’un thriller malin , Out of Order constitue encore aujourd’hui une chambre d’écho des plus pertinentes aux maux qui rongent nos sociétés.

Sortie pour la première fois en Blu-Ray, le 22 août chez Carlotta

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Titre original : Abwärts

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Durée : 90 mn


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