Les Enfants de Timpelbach

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Pour Noël, << Les enfants de Timpelbach >> nous transporte dans un monde d´enfants jouant aux adultes, où les aventures ne manquent pas, bien qu’un peu de simplicité et d´authenticité y auraient été appréciables.

Le joli village de Timpelbach n’a rien de paisible. Les enfants y sont intenables et ne respectent pas l’autorité de leurs parents, si bien que ceux-ci décident de les punir en les abandonnant à leur sort une journée entière. Les choses ne vont pourtant pas se passer comme prévu : les adultes sont emprisonnés loin du village, et ne peuvent rentrer. Pendant ce temps, les enfants, divisés en deux clans ennemis, s’affrontent pour diriger le village.

Nicolas Bary concrétise un projet très personnel en adaptant Les enfants de Timpelbach, classique de la littérature enfantine qui l’a longtemps fasciné. Passionné par l’univers du roman depuis son enfance, il lui avait déjà consacré un court-métrage en 2004 (Before).
Le projet est ambitieux et risqué : le casting est composé à 90% d’enfants, pour certains acteurs débutants, l’univers recréé par Nicolas Bary n’a ni époque ni géographie identifiable et la calligraphie du titre du film nous évoque immanquablement la très populaire saga d’Harry Potter.

Comme dans les romans de J.K Rowling, les enfants sont les héros, mais on est déstabilisé par la faiblesse de l’argument qui conduit des parents visiblement excédés à jouer un tour à leur progéniture. En effet, les délicieux bambins sont soi-disant insupportables, mais nous n’en avons comme preuve en début de film qu’une malheureuse petite farce bien innocente impliquant un chat piégé.

Quoi qu’il arrive, les parents partent donc en cachette dans la nuit, et le film tout entier verra les deux groupes évoluer séparément jusqu’à la toute fin (heureuse). C’est un authentique village wallon qui offre ses murs à l’univers très étudié de Timpelbach, où résident désormais les enfants.
Chaque maison fourmille d’objets, les enfants se servent d’oiseaux volants mécaniques pour se transmettre des messages, la salle de classe est une sorte de madeleine de Proust de l’école d’hier (bonnet d’âne, craie qui grince, règle en bois de la maitresse), bref, ca fleure bon le bric-à-brac d’époque. On remarque d’emblée le soin apporté à chaque décor et aux costumes. Chaque personnage possède un style vestimentaire propre et lié à son caractère, pour le régal des yeux du spectateur. Cette richesse visuelle a pourtant les défauts de ses qualités. Si le récit est rondement mené et rythmé par de nombreuses scènes d’actions, on est parfois embarrassé par cet excès de détails, d’objets en tous genres, qui encombrent des plans très courts et surchargés d’informations, ainsi que quelques effets spéciaux cartonnesque assez mal intégrés à l’ensemble.

Exploiter la liberté

Il est intéressant de remarquer de quelle manière le film aborde un sujet si passionnant : comment vivraient des enfants dans un monde sans adultes ?. Ici, ils se divisent rapidement en deux groupes, les « gentils » et les garnements. Ceux-ci profitent de cette nouvelle liberté pour expérimenter la vie des grands et ses travers jusque-là interdits : le jeu, l’alcool, se coucher tard et tout casser, tandis que les autres, plus sages, cherchent des moyens astucieux pour gérer le village en y instaurant des règles, donner à manger à tous et s’entraider.
Un peu sur le même mode que Big City de Djamel Bensalah, les enfants recréent une micro-société aussi (dés)organisée que celle de leurs ainés : des leaders, des suiveurs, deux clans qui s’affrontent pour obtenir le droit de diriger la cité, ou bien dans le chaos, ou alors selon des règles idéalement démocratiques ! Les enfants parlent comme des adultes, s’attribuent les métiers de leurs parents, et certains sont si sérieux et responsables qu’ils feraient rougir leurs paternels !

Ces nombreuses bagarres et péripéties nous permettent malgré tout d’apprécier une myriade de personnages enfantins : chacun est fortement caractérisé, parfois même stéréotypé, mais on retrouve avec plaisir certains camarades de l’enfance.
Dans le rôle des parents égarés, de nombreux guests, plutôt mal employés (pourquoi affubler Depardieu d’un tel accoutrement, et d’un accent totalement grotesque !) se démènent, eux, pour rentrer chez eux en se comportant comme des enfants. Armelle, en maitresse mi-marâtre, mi bonne-mère hystérique, est finalement drôle, peut-être aux dépens de son jeu outrancier.

Si le film est agréable, ne manque pas de rythme, et saura certainement charmer les petits, il souffre néanmoins d’un manque de justesse, parfois dans l’interprétation, mais aussi dans le ton. Ces enfants, tous si scrupuleusement cantonnés à des personnages parfois hautement improbables, ont perdu un peu de la spontanéité, du naturel maladroit et insouciant qui qui caractérisent leur jeune âge.

Titre original : Les Enfants de Timpelbach

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