Le colocataire

Article écrit par

Le thème de la colocation très à la mode devient ici le moyen de faire se rencontrer deux hommes que tout oppose.

Figure du cinéma gay

Qualifié de « tendre et hypnotique » par le Los Angeles Times, Le colocataire est un beau film charnel et troublant qui oblige presque le spectateur à vivre en temps réel la passion amoureuse qui s’empare de deux hommes que rien ne prédisposait à s’aimer : l’un est un tombeur de femmes et l’autre, son collègue de travail, est tout simplement un colocataire, mais énigmatique et attirant. Pour ce sixième long-métrage, Marco Berger a été présent au Queer Screen du Mardi Gras Film Festival de Sydney en février 2019. Son nouveau projet, El Cazador, vient d’être présenté au festival de Rotterdam. Figure du cinéma gay, Marco Berger a été largement récompensé, notamment pour son premier court-métrage, El Reloj, sélectionné en compétition aux festivals de Cannes et de Sundance. Son premier long métrage, Plan B, a remporté aussi de nombreux succès installant ainsi sa réputation. Ce sixième film, à la trame narrative assez réduite, raconte l’histoire d’amour impossible entre deux jeunes hommes que tout sépare et que tout rapproche. Juan doit vite trouver un colocataire après le départ de son frère. C’est finalement Gabriel, son collègue « blond », charmant et taciturne, qui emménage dans son appartement. Ce qui débute comme un arrangement innocent se transforme rapidement en attraction naissante, puis en passion.

 

Une sorte de tango argentin

Pas difficile à « pitcher », le film qui se déroule quand même sur une durée de presque deux heures, aurait pu facilement devenir ennuyeux même si le réalisateur ne se prive pas de nous montrer de beaux corps nus s’essayant à refuser l’attirance et l’érotisme, pour faire place à un amour qui ne peut s’installer dans la société tout de même très machiste de l’Argentine. Mais c’était sans compter sur les deux acteurs principaux, Gaston Re et Alfonso Baron, qui viennent apporter leurs talents de comédien pour le premier et de danseur pour le second à un scénario fait de rencontres et d’éloignement à la manière d’un tango argentin lascif. On ne peut que tomber sous le charme de cet envoûtement qui en dit long sur les mystères du désir et de l’amour dans toute société à l’heure où, en Europe, l’homosexualité se présente comme un acquis fondamental de la société, ce qui n’est pourtant pas si évident. Ce film le montre d’une manière particulièrement vénéneuse en filmant au plus près les hésitations de l’un et les avancées de l’autre, même si cette histoire d’amour va plutôt mal finir, par une sorte de trahison finalement inévitable.

Filmer el deseo

Ce n’est pas pour rien que Pedro Almodovar a appelé sa maison de production El Deseo (le Désir) car celui-ci est finalement le moteur de toute oeuvre, mais aussi de toute vie, de toute destinée. Marco Berger le déclare lui-même dans le dossier de presse du film, car il a bien voulu faire un film justement sur ce thème et c’est une belle réussite, qui joue à la fois sur les interdits dus au machisme ambiant et le désir qui souvent submerge tout. « Je pense que le désir est ce qui fait bouger l’humanité. C’est ce qui nous a fait construire des villes et développer des technologies. Dans mes films, je l’utilise comme moteur pour raconter des histoires. Cela peut souvent être un désir qui n’est pas exprimé, mais il est présent de toute façon. C’est là l’avantage du cinéma. Le désir peut être caché par les personnages, mais il n’est jamais caché au public. »

Réalisateur :

Acteurs : , ,

Année :

Genre : ,

Pays :

Durée : 101 mn


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi

Journal intime

Journal intime

Adapté librement du roman de Vasco Pratolini, « Cronaca familiare » (chronique familiale), « Journal intime » est considéré à juste titre par la critique comme le chef d’œuvre superlatif de Zurlini. Par une purge émotionnelle, le cinéaste par excellence du sentiment rentré décante une relation fraternelle et en crève l’abcès mortifère.

Été violent

Été violent

« Eté violent » est le fruit d’une maturité filmique. Affublé d’une réputation de cinéaste difficilement malléable, Zurlini traverse des périodes tempétueuses où son travail n’est pas reconnu à sa juste valeur. Cet été
violent est le produit d’un hiatus de trois ans. Le film traite d’une année-charnière qui voit la chute du fascisme tandis que les bouleversements socio-politiques qui s’ensuivent dans la péninsule transalpine condensent une imagerie qui fait sa richesse.

Le Désert des tartares

Le Désert des tartares

Antithèse du drame épique dans son refus du spectaculaire, « Le désert des Tartares » apparaît comme une œuvre à combustion lente, chant du cygne de Valerio Zurlini dans son adaptation du roman éponyme de Dino Buzzati. Mélodrame de l’étiquette militaire, le film offre un écrin visuel grandiose à la lancinante déshumanisation qui s’y joue ; donnant corps à l’abstraction surréaliste de Buzzati.