Interview de Götz Spielman

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Tout juste revenu des Oscars où il était nommé dans la catégorie Meilleur Film Etranger, Götz Spielman fait une escale à Paris pour parler de « Revanche », son dernier film sorti le 11 mars.

La première partie du film mêle plusieurs style et genres, tels que le social, le thriller, la romance, le tout dans un crescendo dramatique très puissant. Comment avez-vous trouvé le juste équilibre en ce début et la seconde partie, plus posée et réflexive ?

Je n’y ai jamais vu de réel problème. Je n’ai pas réalisé qu’il y avait deux parties.

Ce n’est pas un problème, c’est plutôt la tournure que prend le film au vu du pitch et du titre qui surprend.

Je n’ai jamais pensé le film en tant que « genre », ce que vous décrivez ne m’a pas causé de souci, j’ai juste essayé de faire un film personnel. J’ai été effectivement influencé par les aspects que vous décrivez, le thriller, le drame… Les deux parties dont vous parlez, avant et après la mort de Tamara, forment un seul et même bloc. L’histoire démarre à la campagne, revient à Vienne et se conclue à la campagne. Il dessine une ligne temporelle où il situe les moments clés du film. C’est la structure du film qui est ainsi, il n’y a pas de réelle rupture, tout est combiné.

Comme un cercle revenant sur lui-même ?

Tout à fait, comme un cercle oui.

Vous êtes très proche de vos personnages, notamment le couple Alex-Tamara que vous filmez avec beaucoup de tendresse lors de leurs scènes d’amour, au début du film. Pourtant, on ressent comme une forme de distance, dans les deux moments clés du film, celui où Tamara se fait tirer dessus, filmé de manière « extérieure », détachée… on ne voit d’ailleurs pas Tamara mourir. Vous filmez la voiture en plongée, depuis les arbres dans la forêt.

On assistera à sa mort plus tard, en photo.

 

C’était une manière de respecter l’intimité des personnages, de ne pas montrer cette mort ?

C’est une des raisons. L’autre raison était que je voulais montrer les personnages entourés par la forêt. Ça ne passe pas uniquement pas les visages. Nous sommes tous la part de quelques chose, vous voyez. Je ne m’intéresse pas seulement à des personnages isolés, je m’intéresse à des personnages et à leur environnement. Toutes ces choses sont connectées, voilà pourquoi j’ai préféré couper à ce moment-là dans le film.

Vous appréciez le cinéma japonais classique ? Justement, cette distance m’a rappelé Mizoguchi ou Narusé qui aimait filmer de loin les moments dramatiques

Oui tout à fait, ça fait également partie de mes influences. J’apprécie également beaucoup Ozu.

Votre film évoque aussi le cinéma de Terence Malick, dans la manière de mêler un récit dramatique très fort avec un aspect plus contemplatif, s’attardant sur la nature environnante. Je pense surtout aux « Moissons Du Ciel »…

J’ai sans doute été influencé, j’ai vu beaucoup de film vous savez.

 

Le temps semble s’arrêter dans la partie en campagne, plus lente, vous vous attardez sur la nature, répétez plusieurs fois des séquences similaires comme les travaux de ferme d’Alex, le jogging de Robert, l’accordéon du grand père. Était-ce une manière d’exprimer les tourments intérieurs et les doutes des personnages ?

Je crée mes films comme des expériences pour le spectateur, c’est ce que je veux. Je ne travaille pas de manière intellectuelle, je travaille avec l’intuition.

C’est au spectateur d’interpréter ce que vous avez souhaité faire…

Je ne suis pas un prêtre, ni un politicien, j’ai voulu raconter une histoire. Chacun peut l’interpréter pour lui-même, mieux que je ne le ferais. Rien ne se passe, mais en même temps quelque chose se passe. Alex a fait une grosse erreur, il se sent coupable. Il se rapproche du grand-père, ressent une forme d’amour pour le vieil homme, peut-être est-ce la nature, il réalise que Robert n’est pas le méchant qu’il s’imaginait.

Vous arrivez à rendre la confrontation finale entre Robert et Alex très intense, sans artifice.

Merci.

 

D’autres réalisateurs auraient fait tout autre chose d’un tel pitch. Un Michael Haneke en aurait fait quelque chose de plus manipulateur, plus intellectuel et moins proche des personnages que vous, comme sur son « Funny Games ».

Je suis ami avec Michael Haneke, je pense que son travail est très intéressant, la manière dont il travaille l’image, le montage… mais Funny Games n’est pas mon film favori de lui. Par contre, Code Inconnu est un chef d’œuvre pour moi, j’aime beaucoup ce film.

Vos films ont été très peu vus en France jusqu’ici, vous espérez que cela va changer avec le succès de « Revanche » ?

Paris est la capitale de l’art et du cinéma, c’est à ça que j’appartiens, donc j’espère que le public français appréciera, mais si ce n’est pas le cas je survivrai [Rires].

 

Titre original : Revanche

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Genre :

Durée : 121 mn


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