Dans Paris

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Tout commence très mal, très vite. Dans la séquence introductive, Louis Garrel interpelle le spectateur et introduit le récit en donnant les éléments indispensables à sa bonne compréhension. Un ton libre et décalé, un narrateur omniscient, la volonté d´impliquer le spectateur dans l´histoire : tout cela aurait pu fonctionner si les dialogues n´avaient pas été […]

Tout commence très mal, très vite. Dans la séquence introductive, Louis Garrel interpelle le spectateur et introduit le récit en donnant les éléments indispensables à sa bonne compréhension. Un ton libre et décalé, un narrateur omniscient, la volonté d´impliquer le spectateur dans l´histoire : tout cela aurait pu fonctionner si les dialogues n´avaient pas été aussi plats, si la mise en situation des personnages n´avait pas été aussi improbable, et si Garrel s´était révélé moins mauvais (ou moins mal dirigé). La mauvaise impression laissée par cette première séquence ne s´estompera jamais.

C´est l´histoire de Paul (Romain Duris, insupportable) qui, après une douloureuse rupture avec Anna, revient chez son père, lui-même divorcé. Son désespoir le pousse dans un mutisme devant lequel son petit frère (Louis Garrel) et son père et se révèlent impuissants. Puis tout d´un coup, c´est l´explosion de paroles, flots qui jaillissent au détour d´une conversation avec l´une des << amoureuses >> de Louis Garrel, d´une conversation intime avec sa mère ou d´une complicité retrouvée avec son frère.

Dans Paris se veut donc un film intimiste mais léger, référence plus ou moins avouée aux films de la Nouvelle vague. Alors on pourra toujours jaser sur les différentes carences scénaristiques, sur cette évocation de Paris qui prend des formes d´<< attrape-touriste >> ou sur le manque de profondeur des personnages. Mais on surtout le sentiment qu´il manque au film quelque chose de plus fondamental : une identité, une âme probablement. A trop vouloir s´inspirer des Truffaut, Godard et autres Rohmer, Christophe Honoré en oublie de se concentrer sur son propre film et nous signe un << objet filmique >> que l´on pourrait qualifier d´impersonnel.

Le problème réside dans le manque d´authenticité du ton employé. Le film sonne faux et creux. On peut prendre pour illustrations la séquence d´introduction, la séquence de la chanson au téléphone, les ruptures dans la mise en scène, le ton volontairement libre et décalé, ou bien encore les faux raccords qui viennent émailler le film : Honoré se contente de reprendre différents procédés stylistiques et narratifs (caractéristiques de la Nouvelle vague) sans pour autant se les réapproprier ou les réinventer. Dans Paris ressemble à une vague tentative de << copier-coller >>, à une oeuvre scolaire passée à la machine à laver, qui aurait perdu en route couleurs et saveur. Bref, l´exigence que porte le cinéaste sur son film est minimaliste.

Dans Paris stigmatise l´impasse dans laquelle le cinéma français semble s´être fourvoyé depuis quelques années déjà. D´un côté, il y a tout ce pan de la production cinématographique qui adopte pour modèle celui du blockbuster hollywoodien sans en avoir la puissance de production et de distribution. De l´autre, on trouve ces films << auteurisant >> sans intérêt, à part celui de dire qu´il existe un << cinéma d´auteur >> français, notion qui d´ailleurs ne fait aucun sens quand on lui colle une acception qualitative.

Voguant entre passé et modernité, Dans Paris fait également ressurgir un mal bien français, où le manque de créativité du cinéma est chevillé à un mouvement douloureux autour du rapport entre passé et présent : une incroyable complaisance et une perpétuelle référence à un glorieux passé, et une croyance forcenée en la faculté à représenter quelque chose d´unique, de créatif et de << moderne >>. Douce illusion…


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