Une leçon d’amour (En lektion i karlek)

Article écrit par

D’abord ce plan. Vue large sur un port. Le jour se lève, un couple se dispute. David et Marianne. Des cris mais point de chuchotements. La séquence est belle, instantanée et interminable. Bergman, l’auteur de cet affrontement verbal, choisit de filmer ses personnages aussi loin que la caméra lui permet, refusant ostensiblement de les épier. […]

D’abord ce plan. Vue large sur un port. Le jour se lève, un couple se dispute. David et Marianne. Des cris mais point de chuchotements. La séquence est belle, instantanée et interminable. Bergman, l’auteur de cet affrontement verbal, choisit de filmer ses personnages aussi loin que la caméra lui permet, refusant ostensiblement de les épier. La vie n’est pas forcément un long fleuve tranquille mais cette engueulade reste captivante car toute la thématique du film est concentrée dans ces quelques minutes magiques où le temps semble s’arrêter, féru d’observer cette scène de la vie conjugale.

Une leçon d’amour est une œuvre mineure dans la filmographie du suédois. Réalisé entre la magnifique Nuit des forains et le discret Rêves de femmes, cette comédie légère et sympathique permet à Bergman de réfléchir sur les crises conjugales passagères.

Démarrant sur les chapeaux de roues (on se croirait chez Lubitsch), Une leçon d’amour entraîne progressivement le spectateur vers une histoire de reconquête amoureuse. Les intentions de David sont mystérieuses tant Bergman se délecte à nous le montrer comme étant un homme lâche, fragile et perturbé. La vérité est ailleurs, dans cette flamboyante juxtaposition de scènes intimes (les échanges entre David et Marianne sous un ciel printanier) et de burlesque assumé (le premier mariage chaotique de Marianne), laissant au cinéaste le temps de reprendre son souffle et de mieux façonner son suspense.

Un sentiment gentillet se dégage de cette comptine sucrée. Une leçon d’amour nous enveloppe d’un je-ne-sais-quoi qui amuse nos sens, nous ravit parfois et surtout nous donne l’envie d’aller épier d’autres œuvres de ce suédois folâtre !

Lire aussi

Trois films de Pietro Germi sur fond de terre brûlée sicilienne

Trois films de Pietro Germi sur fond de terre brûlée sicilienne

Pietro Germi figure un peu comme un outsider ou, en tous les cas, le mal aimé du cinéma italien de l’âge d’or. Et les occasions de réhabiliter son cinéma enclin à la dénonciation sociale jugé parfois moralisant et édifiant mais toujours captivant et divertissant ne sont pas légion. Le distributeur Tamasa vient de pourvoir à cette injustice en sortant trois films invisibles en versions remasterisées.

Je suis un fugitif

Je suis un fugitif

Dans ce film glauque au pessimisme foncier, quasi ignoré et pourtant précurseur, Alberto Cavalcanti exhibe un monde sans héros; uniquement peuplé de manipulateurs veules et sournois, de malfrats sans foi ni loi, de femmes fatales, de harpies, de mégères ou d’épaves à la dérive. Ce film noir s’inscrit dans la lignée des nombreux films spiv britanniques, un sous-genre qui fit florès dans l’immédiat après-guerre. Redécouverte…

Déserts

Déserts

Au Maroc, lorsque que vous ne remboursez pas vos dettes, vous risquez de voir débarquer deux agents de recouvrements en costume criard, bon marché mais toujours impeccable. Mehdi et Hamid, entre menace et arrangement, arrachent ainsi aux pauvres ce qu’ils ne peuvent cacher, travaillant à rendre le désert encore plus désert, jusqu’à se trouver eux-mêmes coincé par une histoire de vengeance qui n’est pas sans rappeler un scenario de western.