Une grande année (A good year) est loin d’être un grand film. A mauvais film, mauvais jeu de mot. Amateurs de mélodrame et de clichés, tenez vous prêt, le « 2 en 1 » vient de d’arriver. Décapant, le décalage entre les films habituels de Scott et celui-ci à de quoi surprendre plus d’un de ses fans. Mélodrame à la sauce provençale, Une grande année ravira tout spectateur en quête de bons sentiments naïfs.
L’histoire est celle d’un courtier en bourse londonien qui hérite d’une maison située dans notre bonne vieille Provence française. « Homme pressé », comme dans la chanson de Noir Désir, Max (Russel Crowe) cherche à se débarrasser de cette propriété au plus vite, quitte à mettre au chômage technique le couple qui vivait et entretenait le domaine viticole. Mais tout cela était bien évidement sans compter les charmes de cette région qui fait un pied de nez retentissant à la grisaille et la pluie londonienne, son triste quotidien, mais également sans compter la ravissante Fanny, une serveuse du patelin d’à côté qui lui a carrément tapé dans l’œil.
Dans Une grande année, les clichés, caricatures et autres images d’Epinal se bousculent tellement que les énumérer accuserait un travail bien trop fastidieux. Citons pour l’exemple le traitement de la Provence qui se résume à des vignes, une vieille maison, un petit village typique et des cyclistes en bord de route. Si le film est une épreuve, il le sera d’autant plus pour tout spectateur originaire du sud-est français, tant il est exaspérant de constater que l’image de cette région n’aura pas évoluée en cinquante ans de représentation cinématographique. A l’époque, le jeune François Truffaut réalisait son second film, un court-métrage en noir et blanc intitulé Les Mistons (1957), et qui dressait déjà un portrait semblable bien que plus réjouissant de ce coin de la France. Par ailleurs et pour en revenir aux déceptions du film, les acteurs sont constamment enfermés dans des personnages qui ne leur laissent que trop rarement l’opportunité de véritablement s’exprimer. Regrettable pour un Didier Bourdon dont on se réjouissait à l’avance qu’il donne la réplique à Russel Crowe. Un choc des cultures en perspective alléchant, mais qui tombe finalement dans le non événement.
L’histoire subit le même sort simpliste et réducteur, aucun tournant, aucun rebondissement supposé ne parvenant à nous surprendre. Imaginez quelle pourrait être la fin… et bien vous l’avez devinée. Face à tant de déceptions, le spectateur n’a d’autre choix que de se laisser bercer par le rythme doux et lancinant qui lui est imposé. Et l’une des rares réussites du film réside justement sur ce point. Scott est un formidable conteur d’histoire. Avec autant de situations faciles à anticiper, on s’étonne parfois d’adhérer à la niaiserie ambiante. Les flash-back de Max, convoqués pour lui rappeler les bons souvenirs de ses étés passés dans la propriété lorsqu’il était enfant, sont souvent touchants, même émouvants. Ponctuant régulièrement le film, ces passages lui apportent quelques bouffées d’oxygène nécessaires, l’alternance répétée entre ces souvenirs et le présent agissant comme une respiration qui permet de maintenir le film en vie.
Dans ce film-gimauve, on se surprend donc à se laisser porter par une ambiance qui d’ordinaire nous effraierait de platitude. Sans prétentions, certaines scènes nous projètent dans un monde bucolique, agréable et enivrant. La vie y est simple, il y fait beau, les gens sont sympas, les paysages sont magnifiques et en plus on y mange et on y boit bien. Mais en dépit de ces efforts, tel un enfant gâté s’amusant avec un de ses nouveaux jouets, dans son dernier film Scott se donne à voir comme un cinéaste inculte qui s’essaierait arbitrairement à représenter et traiter à l’écran une région et une histoire dont il n’a finalement que faire. Alors maintenant qu’il a réalisé son caprice, espérons simplement que sa maturité revienne à temps pour son prochain projet.