Pas grand-chose à sauver de ces deux visages de janvier et de cette première réalisation. Hossein Amini passe beaucoup de temps à colorier ses jolies images. On pressent un bon budget de filtres pour le film et de pomponnage pour Kirsten Dunst grimée en bobonne bourgeoise choucroutée et qui exploite jusqu’à plus soif minauderie et moue boudeuse, ses deux cartes maîtresses quand elle n’est pas dirigée d’une main de fer. Quant à savoir ce qu’allait faire Mortensen dans cette galère ? Mystère. Un désir de soleil ? Le goût de Patricia Highsmith ? Peut-être. Mais Amini perd tout sens du polar, et plus largement de l’intrigue en passant derrière la caméra. Le roman sert de malheureux cache-misère à une déambulation touristico-policière qui tente une réunion des contraires assez mal sentie. Un voyage en Grèce comme en Italie donc (Roberto Rossellini, 1954) d’un couple plus ou moins uni avec son guide : une lente remontée dans l’histoire locale qui mettra à jour la relation. Mais ce voyage intime se fait sous l’ombre très pesante d’Alfred Hitchcock dont Hossein Amini semble n’avoir retenu que le suspense arrosé à coup de musique plus qu’inspirée de Bernard Herrmann et le choix de lieu inattendu pour la scène clef du film. Sans même parler d’une structure évoquant très étrangement Psychose (1960). Ça commence à faire beaucoup. Hitchcock ayant lui-même adapté Highsmith (L’Inconnu du Nord Express, 1951), on surprend le scénariste en plein délire citationnel aussi poussif que stérile.
Ajoutons à tout cela – car évidemment ce n’était pas suffisant – la tentation ultime, soufflée par la situation géographique du film : la bonne vieille tragédie. Parce qu’en plus d’avoir l’épaisseur d’un timbre-poste, les personnages doivent assumer la responsabilité de répondre à des archétypes, offrir un modèle humain et participer à la résolution d’un dilemme éthique. On s’attend à tout moment à voir un chœur débouler de derrière une colonnade… Mais à défaut de savoir quel mythe raconter, les essais pour élever le film à une dimension métaphorique se prennent les pieds dans le péristyle. C’est dans un état de consternation qu’on traverse The Two Faces of January, étonné face à l’incapacité de plus en plus nette du réalisateur à mettre en scène le moindre enjeu et la moindre tension dramatique jusqu’à un finale fatalement éclatant de ridicule. Un roman laminé, des acteurs sous-employés, un scénariste-réalisateur à côté de ses pompes… Une vraie tragédie oui !