Au départ de ce Salt, il y a une idée formidable. Durant la Guerre Froide, les Russes auraient formé des agents d’élite depuis l’enfance destinés à substituer l’identité d’américains pour des opérations fomentées des décennies à l’avance. Un pitch au potentiel incroyable dont Philip Noyce ne parvient à tirer rien d’autre qu’un énième film d’action à base de courses poursuites et aux enjeux d’un autre âge, avec le retour du bon vieil antagonisme russo-américain… Il ne fallait pas en attendre bien plus de Noyce, honnête faiseur dont la seule réussite notable, Calme Blanc, est due au « coup de main » de son prestigieux producteur George Miller. Quant au scénariste de la chose, Kurt Wimmer, passé le plaisir de faire se battre ses héroïnes sexy, il n’a jamais fait montre d’une grande inventivité, comme le démontrent ses propres réalisations (Equilibrium – sous Matrix vaguement distrayant – ou le très comic book – et surtout très raté – Ultraviolet).
Angelina Jolie est l’unique atout du film. Formidable en néo Mata Hari, elle passe de la blonde sophistiquée à la vamp aux cheveux noirs de jais, puis à la garçonne coupée court et en débardeur lors du finale. Ses multiples revirements et sa sincérité confèrent un semblant de surprise au script balisé, cette dernière faisant subtilement pointer son émotion sous ses allures froides, étant en tout point en adéquation avec son personnage habitué à dissimuler ses pensées. Entre de bonnes mains, Salt semblait avoir le potentiel pour égaler le formidable Au revoir à jamais, où Geena Davis délivrait une prestation rock’n’roll et à fleur de peau en barbouze amnésique. Philip Noyce se contente malheureusement d’aligner les séquences d’actions molles et déjà vues ailleurs en mieux, trouvant même le moyen d’être prévisible dans son casting (Liev Schreiber en traître pour la énième fois…). Ni pire ni meilleur que d’autres grosses machines sorties cet été, un produit de série qui s’oublie aussitôt les lumières allumées.