Obvious Child

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Une comédie romantique sur une fille qui déteste les comédies romantiques

« Avant, je planquais ce que ma chatte dépose dans mes culottes ». Voici Donna Stern (Jenny Slate), bientôt trentenaire, bientôt licenciée, bientôt larguée par un petit ami qui a du mal à voir sa vie exposée plusieurs soirs par semaine sur une scène de stand up et, cerise sur le gâteau, bientôt enceinte après une aventure d’un soir avec Max (Jake Lacy). Un inconnu aussi tiré à quatre épingles qu’elle est brouillonne, aussi rassurant qu’elle est indécise mais surtout, tous les deux aussi maladroits l’un que l’autre…

Obvious Child, version longue du court métrage du même nom réalisé en 2009 par Gillian Robespierre, débarque en France déjà auréolé, outre-Atlantique, d’un succès à la fois public et critique. Et, récompense ultime, tamponné « vu et approuvé » par le sacro-saint festival de Sundance, Mecque du cinéma indépendant américain. Le casting y est sans doute pour quelque chose puisque la réalisatrice a choisi ses acteurs dans la nouvelle garde de la comédie yankee subversive et sarcastique : Jenny Slate de Parks and Recreation, Gaby Hoffmann de Girls ou encore Jake Lacy pour The Office, mis au service de personnages a priori archétypaux de ces films qu’affectionne tant Sundance. Une fille qui travaille dans une librairie révolutionnaire le jour et fait du stand up la nuit, son meilleur ami gay et sa meilleure amie féministe, évoluant tous dans le périmètre resserré de Brooklyn. Salauds de hipsters ? Même pas. Ils sont bien trop instables pour tenir dans la case à laquelle ils sont censés appartenir.

 
A commencer par Donna, qui se décrit elle-même comme « un croisement entre Natalie Imbruglia et une menorah » ; vulgaire, ne crachant jamais sur une bonne cuite entre amis, complice d’un père un peu artiste un peu laxiste, c’est une vraie fille. A qui il arrive de se cacher dans un carton pour échapper à ses problèmes car Donna est aussi une véritable enfant, et attendre un enfant quand on est encore une soi-même, ce n’est pas envisageable. Dès qu’elle apprend qu’elle est enceinte, sa décision d’avorter est irrévocable et personne ne tentera de l’en dissuader par des tirades moralisatrices ou des accusations culpabilisantes. Prise de rendez-vous, salle d’attente, prise de médicaments, l’avortement est montré dans sa réalité médicale. Cette grossesse est un problème, l’avortement est donc une des solutions, pourtant rarement retenue au cinéma ou dans les séries comme si les scénaristes étaient encore hantés par le spectre du Code Hays. Adoption (Juno, Jason Reitman, 2007), fausse couche (Desperate Housewives), ou même garder l’enfant au prix de sa propre vie (Twilight 4, Billi Condon, 2011), tout lui est préféré. Cette fois, la réalisatrice ne recule pas devant l’obstacle et ne prend pas vingt paires de gants pour en parler, s’autorisant même à en faire un sujet de blague grâce à l’autodérision de son personnage principal. La maladie peut être drôle, la mort aussi alors pourquoi pas l’avortement ?

 

 
Il ne faudrait tout de même pas oublier qu’Obvious Child ne se pose pas comme un film militant. C’est avant tout une comédie romantique avec une rupture douloureuse au début (donc dépression et jogging), une rencontre improbable au milieu (donc doutes et hésitations) pour finir par deux mains qui se tiennent à la fin devant un des plus grands mélodrames du cinéma. On l’a déjà vu cent fois cette histoire des contraires qui s’attirent – lui en duffle-coat et elle en pull informe, elle fuyante et lui patient mais eux qui s’aiment beaucoup et ne savent pas comment se le dire – mais pour une fois on n’a pas honte de l’aimer. Parce que c’est de mauvais goût et parce que c’est drôle. Un peu comme la vie quoi…

Titre original : Obvious Child

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Durée : 83 mn


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