Journal d’un Festival : Valenciennes 2009

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Du 26 au 29 mars, se déroule la 20ème édition du Festival du Film de Valenciennes. Suivez au jour le jour ce nouveau cru 2009, éclectique et fruité!

Jeudi 26 mars

À l’heure où Barack Obama prend ses marques à La Maison Blanche, Le Festival de Valenciennes s’ouvre avec un film politique (en compétition) relatant un moment d’histoire devenu culte. Frost/Nixon, l’heure de vérité, de Ron Howard, revient sur le duel télévisé qui opposa l’animateur – so british – de variétés et le Président démissionnaire des États-Unis. Nous sommes en 1977, et ce qui ne devait être qu’une interview-bilan prendra la forme d’un combat de coq. Au fil des séquences, la nature de l’enjeu fait naître une tension si forte qu’elle fait pâlir les plus blancs sourire. Ce qui se joue dans ce face à face ne se réduit pas aux millions de dollars investis, c’est d’honneur dont il est essentiellement question.
Monté comme un reportage, avec témoignages de faux protagonistes (mais vrais acteurs !) et images d’archives, Frost/Nixon, l’heure de vérité (qui sort en France ce mercredi 1er avril) inaugure les hostilités festivalières. La suite de la sélection officielle laisse présager de jolies surprises, et un grand tour du monde.

     

Vendredi 27 mars.

Quelle bien belle journée ! Vendredi pluvieux certes, mais cinématographiquement heureux. La compétition officielle de ce jour a débuté à 14h30, avec Still Walking, de Kore-Eda Hirokazu. Au Japon, une famille se retrouve pour célébrer le morbide anniversaire du décès du fils aîné. Entre non-dits et traditionnalisme, chacun tente avec plus ou moins de tact de faire comprendre aux autres ce qu’il ne peut dire, et aussi ce qu’il espère au plus profond de son être. Une esthétique contemplative, qui trouve son paroxysme en ce printemps nippon, établit insidieusement entre les personnages une distance physique et narrative. La multiplication de plans fixes ne fait qu’accroître ce fossé, appuyant par là même des images claires et lisses qui ne tentent pas de dissimuler les traumatismes. Sous la blancheur les douleurs, sous la blancheur la noirceur…

Des souffrances aussi, pour le deuxième film du jour, La boîte de Pandore. Le réalisateur Yesim Ustaoglu offre à Tsilla Chelton (déjà délicieusement exécrable en Tatie Danielle) un rôle intense, presque muet et pourtant si expressif. Une histoire de famille aussi, de déchirement fraternel et de solidarité. Les enjeux ici pourtant ne sont pas les mêmes. Dans La boîte de Pandore, il est plus question d’héritage (symboliquement parlant) que de lutte. Car les personnages font éclater leurs conflits, permettant aux douleurs de ne pas se transformer en rancœur. Avec habilité, le réalisateur peint les souffrances de l’oubli (la maladie d’Alzheimer), sous les notes d’une bande son remarquable (une mélodie au piano, accompagnée par une clarinette et des cordes). Un film tendre et émouvant, poétique et charmant. Un grand moment de grâce…

Une soirée de compétition qui fût elle placée sous le signe de la comédie, avec la diffusion en avant-première du dernier film d’Élie Chouraqui, Celle que j’aime. Accompagné de Barbara Schulz et de Marc Lavoine (les deux premiers rôles), le réalisateur a fait part de sa joie et de son émotion au public venu nombreux pour assister à la projection. Ce film français évoque, avec un humour acidulé et incisif, un événement devenu banal dans notre société : l’arrivée d’un beau-père. Une comédie qui sait apporter ce que le public attend de ce style de cinéma, à savoir un divertissement qu’il est plaisant d’aller voir en famille.

  

Samedi 28 mars.

Ce qu’il y a de jubilatoire dans un festival, c’est cette espèce d’excitation qui maintient en éveil malgré le manque de sommeil. Rien de tel que de « manger de la pellicule » à longueur de journée pour avoir une forme o-lym-pique! C’est donc avec une impatience enfantine et une joie débordante que je me rend au cinéma Gaumont, prête à me nourrir une fois encore de ces instants sur grand écran.

Il est 14h30 et le cinquième film de la compétition officielle des longs métrages s’apprête à faire son entrée. The Proposition, de John Hillcoat, western australien produit en 2005 (qui, pour des raisons qu’il est inutile d’exposer ici, ne sort que cette année en France), est un petit bijou du genre. Esthétiquement très abouti, bien interprété et magistralement mis en scène, les quelques faiblesses dont il pâtit (comme, par exemple, une surabondance de « plans-clichés » empruntés au western classique et qui n’ont pas toujours lieux d’être) sont vite oubliées devant la cohérence totale de l’œuvre. Avis aux âmes sensibles et autres petits cœurs fragiles, certaines scènes, certes légitimes dans la narration, sont d’une rare violence. Vous pouvez toujours fermer vos yeux, à condition de vous boucher aussi les oreilles : la bande son (tout simplement parfaite…) en l’absence du regard aurait cet effet pervers d’entraîner l’imagination dans des images souvent pires que celles projetées à l’écran!

Le sujet de The Other Man (de Richard Eyre), deuxième film de la compétition projeté ce jour, ne laissait pas présager de formidables choses. Mais au cinéma jamais il ne faut s’attendre à quoi que ce soit. Car The Other Man fait partie de ces exemples parfaits qui prouve une fois de plus que peu importe le sujet, pourvu qu’on ait l’ivresse! Peter (Liam Neeson) découvre, après la disparition de sa femme, l’existence d’un « autre » homme, à Milan. Lisa (Laura Linney) aurait donc eu une histoire d’amour parallèle avec Ralph (Antonio Banderas). Même si la vengeance fût le point de départ du voyage de Peter vers Milan, le film sait basculer progressivement et avec tact vers un sentiment plus serein, portant les personnages au-delà des haines et des adversités. L’inexplicable se nourrit du sceau du secret, et le plus grand mystère de l’existence n’est pas forcément celui que l’on croit : à côté des énigmes de l’Amour, celles de la mort ne sont que des chimères.

Place à présent à un biopic pour le dernier film en compétition. Soeur Sourire (de Stijn Conix) relate donc l’histoire de cette jeune femme des années cinquante, belge et rebelle, qui composa un jour dans son couvent le fameux « Dominique » (« …nique, nique, s’en allait tout simplement, / Routier, pauvre et chantant,… »). Cécile de France en religieuse vaut le détour, portée par un grain de pellicule digne des films des années soixante. Un constat cependant, qui ne fait ni office de conseil et encore moins d’avertissement : il est fort probable que l’air vous trotte dans la tête. Et ce pour quelques heures!

Dimanche 29 mars.

Dernier réveil à Valenciennes. Des images plein la tête et déjà des souvenirs au cœur. La sélection officielle a tenu ses promesses. Mieux. Elle a ouvert les routes de la découverte, celle d’un cinéma lointain et parfois peu (re-)connu. C’est aussi cela l’essence même d’un festival réussi. Faire accéder  nos yeux ignorants aux voluptés des cinémas d’ailleurs. La magie des salles obscures n’a pas de frontière ; l’art est fédérateur c’est un fait.
La cérémonie de clôture fût donc tout naturellement à l’image des jours qui l’ont précédée. Éclectique, drôle, émouvante… et en un mot comme en trente : RÉ-U-SSIE! Retrouvez le palmarès de cette vingtième édition du festival de Valenciennes sur le site www.festival-valenciennes.com
Et, pourquoi pas, à l’année prochaine!

NB : Bien-sûr, n’est évoquée ici que la compétition officielle des longs-métrages et il est compréhensible qu’une certaine forme de déception n’apparaisse ! Mais à chaque festival, et malgré les frustrations, il faut savoir faire des choix. À Valenciennes, le programme est riche et passionnant : impossible donc de se focaliser sur plusieurs choses en même temps (surtout pour une blonde!). N’hésitez donc pas à aller sur le site officiel…

Un IMMENSE merci à Amandine Marécalle pour son extrême gentillesse, sa disponibilité et son professionnalisme.

Plus d’informations sur www.festival-valenciennes.com

Titre original : Frost/Nixon

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Durée : 122 mn


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