Bye Bye Blondie

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Deuxième réalisation pour Virginie Despentes, « Bye Bye Blondie » est un bon coup de poing amoureux.

Plus de dix ans ont passé depuis le scandale Baise-moi, co-réalisé avec Coralie Trinh Thi. Ce qui change dans cette seconde adaptation littéraire, c’est la nature même du roman. Avant tout le reste, Virginie Despentes est romancière et essayiste. Si elle a fait une entrée fracassante dans le milieu du cinéma, amenant avec elle le punk, sa musique, la colère et un certain sens du crade, une liberté financière (à savoir pas d’argent !), c’était pour réaliser son premier film, mais surtout mettre en images un certain manifeste qu’elle avait pensé.

Dans une des premières scènes de Bye Bye Blondie, le personnage de Béatrice Dalle est forcé d’expédier le souvenir d’une amourette récente aux oubliettes : ses livres, disques et habits sont jetés du haut d’un immeuble par l’amoureux déçu, écrasés au sol en un tas de vestiges du passé. Manière de dire que ce qui a été est désormais loin, digéré, assimilé même, pour engendrer de nouvelles formes. Puis Béatrice Dalle s’en va sur la musique des Béru, marche comme elle combat, insultant le badaud, et incarne en une séquence visuellement plutôt sage toute la rage encore bien présente dans le film à venir. Le fond est toujours là.

La forme de Bye Bye Blondie est encore bigarrée, sans respect de certaines règles élémentaires de cinéma, foutraque et souvent moche. Punk en somme. Malgré un budget et une production bien plus classiques que pour Baise-moi, la réalisatrice ne s’embarrasse toujours pas de crédibilité, de justesse des dialogues et des acteurs.

Va-et-vient entre la France des années 80 et celle d’aujourd’hui, capitale et province, musique et milieu de la télévision, univers culturel parisien et punk ; entre deux personnages de femmes surtout, Frances et Gloria, la blonde (Emmanuelle Béart) et la brune (Béatrice Dalle). Alors que Baise-moi était la cavale insensée de deux femmes liées par la même haine des hommes et un milieu économique dépressif et étouffant, Bye Bye Blondie est en quelque sorte une version mature, mais pas pour autant assagie, d’une histoire féminine envers et contre tous, construite sur l’attirance de deux opposés. Dire que deux personnages (et deux actrices françaises) puissent être plus antinomiques est un euphémisme. Despentes joue de cet amour a priori impossible entre deux femmes pour construire son film en flashback, des origines de la romance jusqu’à son accomplissement, presque vingt ans plus tard.

Le véritable atout du film est bien entendu son casting : Soko et Clara Ponsot, interprétant les héroïnes dans leur jeunesse sont formidables, ainsi que le choix de Béart pour incarner cette bourgeoise arrivée encore rebelle, malgré le lissage de l’intelligentsia parisienne. On apprécie de la voir garce, tour à tour moqueuse et violente, donnant des coups de poing, accrochée à une histoire à laquelle elle veut croire en dépit de tout. Et Béatrice Dalle n’a pas trop à se forcer pour interpréter une punkette RMiste qui se fout de tous. Le duo amoureux fonctionne, charnel et explosif.

Plus sentimental qu’on s’y attendait, le film s’achève sur un triomphe amoureux, relaté par la voix-off d’un écrivain délaissé (Pascal Greggory, toujours parfait). Acceptant que la rustre Gloria lui ait volé un amour plus intellectuel que physique, capitulant dans son français littéraire devant l’évidence d’un idéal fou, celui du refus de l’ordre établi. Le film en son entier est dans ces quelques phrases, préférant jouer sur la force de sa sincérité plutôt que sur une forme de contrôle visuel dont Despentes est incapable, et qu’on ne lui souhaitera pas.

Titre original : Bye Bye Blondie

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Durée : 97 mn


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