André Téchiné, le fou lyrique

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Grand cinéaste dont la précision du cadre cinématographique et l’intelligence des mots sont de loin rarement égalées dans le cinéma français. Focus foudroyant sur un cinéaste important.

André Téchiné.

Quelques mots d’abord. Eternel adolescent, romanesque, noirceur, travail de mémoire, lyrisme d’apprentissage. Téchiné est sous les feux de l’actualité avec son dernier opus, La Fille du RER, tiré d’un fait réel qui avait méchamment défrayé la chronique. Beau film, puissant et qui continue d’exercer une forme de vampirisme quelques jours après l’avoir vu. L’œuvre téchinienne ne peut laisser indifférent tant sa beauté plastique et ses va-et-vient incessants d’une caméra frénétique sont aussi conséquent que le romantisme exacerbé qu’il filme intelligemment. Revoir un film de Téchiné, c’est d’accepter de se retrouver face à ses propres démons, à ses doutes et surtout à celle ou celui que nous aimons et chérissons plus que tout au monde. Voir un film de Téchiné, c’est refuser le misérabilisme et conserver la naïveté de son adolescence. Les Temps qui changent , l’un de ses plus beaux film, pourrait résumer une filmographie placée sous la reconnaissance et la volonté de l’amoureux transi. Depardieu, pour mémoire, est un quinquagénaire qui n’a jamais accepté l’idée de devoir terminer sa vie sans son seul et premier amour. Il faut voir Téchiné prendre un malin plaisir à grossir son personnage, à le rendre flou, vulnérable et surtout à le déboussoler devant sa bien-aimée, campée par une Catherine Deneuve aussi juste qu’exigeante. Cette scène finale où leurs mains se rapprochent pour ne plus se quitter est l’une des plus réelles que le cinéma français ait pu donner depuis le début de cette décennie. Et dieu sait que notre monde à besoin de volonté amoureuse !

Téchiné aime les puzzles et ses films sont de vrais labyrinthes où se perdent des âmes esseulés, des gueules d’amours, des éphèbes intransigeants, des femmes-enfants et surtout des apprentis de la vie. On chante beaucoup dans ses films, d’une voix discrète dans J’embrasse pas aux chœurs populaires des Roseaux sauvages, la voix devient moteur de recherche et embellit une caméra qui n’en finit plus de trouver ses repères. Maelstrom de sentiments, tourbillon de la vie, telles sont les cartes de Téchiné qui place des quinte flush sans se prendre pour Doc Hollyday mais en gardant les coups de reins du Kid de Cincinnati.

Entre une solarité évidente, un romantisme noir et beau et un focus sur les deux derniers films de Téchiné dont l’Histoire prend tout un sens (Les Témoins et La Fille du RER), la rédaction d’Il était une fois le cinéma se penche, une fois n’est pas coutume, sur un cinéaste aussi important que François Truffaut et malheureusement trop sous-estimé.


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