The Cloud in Her Room

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Film troublant et esthétique, ce film nous livre à la fois l’intimité d’une femme et le mystère d’une ville.

Hiver humide à Hangzhou

C’est un hiver humide à Hangzhou, Muzi rentre pour le nouvel an lunaire. L’ancien appartement de ses parents est toujours là. Un lit, une chaise abandonnée, une fenêtre abîmée – les restes d’une relation qui a évolué. Son père a fondé une nouvelle famille, sa mère est en couple avec un étranger ; Muzi replonge dans ses souvenirs et tente de trouver des repères dans cette ville si familière et pourtant si changée. La jeune femme est tiraillée entre passé et présent, entre la fuite et l’éternel retour. Voici pour le synopsis de ce film très Nouvelle Vague de la hongkongaise Xinyuan Zheng Lu qui nous emmène dans un voyage immobile dans sa ville natale dans un magnifique noir et blanc qui, pour un Français, évoque bien sûr Jean Eustache.

 

Explorer les voies du désir et du rêve

Il s’en dégage une grande mélancolie que la critique Anne Schneider de la revue en ligne Sens Critique n’hésite pas à comparer à l’univers du philosophe Gaston Bachelard. « Flanquée d’un directeur de la photographie d’exception – Matthias Delvaux, qui avait également travaillé sur Vivre et chanter (2019) de Johnny Ma, et qui apparaît ici également à l’écran, en amant maternel, dans une scène d’apprentissage des langues à la fois délicate, un peu onirique, et des plus réjouissantes – la demoiselle apparaît nourrie au biberon des films expérimentaux et autres essais d’artistes, écrit-elle le 1er octobre 2021. De ce biberonnage, et avec la complicité de Matthias Delvaux, de Sheng Chenchen à la direction artistique, et de Gang Yang et Li Dan-feng, pour un travail approfondi sur le son, Zheng Lu Xinyuan fait son miel et, sur un argument relativement épuré, nourri de ses expériences et de son propre rapport à sa ville d’origine, Hangzhou, elle embarque son spectateur dans une véritable odyssée immobile, explorant les voies du désir, de l’attente, des liens humains fondamentaux, des souvenirs et des rêves. »

 

Que tout change pour que rien ne change

On a donc beaucoup de mal à reconstituer le vrai du faux, le réel du rêve dans ce film dont le titre, déjà très poétique, est sans doute une allusion aux nuages qui passent et qui sont merveilleux et qui, cependant, voilent la réalité pour laisser la place à une chambre dans laquelle on peut dormir, mais aussi faire l’amour dans la folie des corps et des retrouvailles. Car le film, d’une grande beauté formelle, représente sans doute un chant d’amour à la ville de l’enfance, à ce qui se transmue pour mieux rester identique, comme pour paraphraser les mots du vieux Guépard dans le livre de Giuseppe Tomasi di Lampedusa et le film de Luchino Visconti : « Il faut que tout change pour que rien ne change. » En effet, cette assertion pour le moins énigmatique prend tout ton sel ici à regarder ce beau film, troublant, rêveur et sincère qui montre aussi les liens secrets et invisibles qui lient un enfant à ses parents.

 

Titre original : Ta fang jian li de yun

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Durée : 101 mn


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