Balance ton porc
Face aux larmes de sa compagne, Richard rétorque sans sourciller « Tu es une si belle allumeuse qu’il est difficile de résister à l’envie de te violer ». Regards lubriques, gestes et remarques sans vergogne, les trois archétypes masculins méritent bien de figurer en tête de liste du célèbre hashtag qui mène actuellement la vie dure aux machistes de tout poil. De quoi légitimer le sort qui leur est promis. Un gore militant ? Un Get Out (Jordan Peele, 2017) féministe ? Pas vraiment. Coralie Fargeat charge également sa Lolita. Une bimbo peu en reste coté provoc. En matière d’exhibition la parité est respectée, le sculptural Richard n’est guerre embarrassé par sa nudité, même lorsqu’il doit courir avec un flingue à la main.
C’est avec plaisir que la caméra se charge de détailler les atouts physiques. D’une façon plus générale, Fargeat s’est visiblement bien amusée dans son travail de composition (plus particulièrement lors des scènes d’intérieur). Du très gros plan dérangeant, aux filtres couleurs malicieux, en passant par les reflets en forme de clin d’œil, nul doute que le story-board fut des plus minutieux. Une esthétique qui emprunte ses codes au Comic Strip, avec des Bang ! Splash ! qui résonnent plus fort que nature. Niveau décors, deux terrains de jeu sans limites pour faire cache-cache : l’immense villa de rêve et l’inhospitalière zone désertique de canyons.
Sang frais
Les mutilations sont d’un réalisme qui a de quoi tirer au cœur. Saupoudré d’une bonne dose d’humour, ce trash pur et dur ravira les nombreux amateurs du genre. A ce titre, la scène de chirurgie reconstructive, à l’aide une cannette de bière, mérite à elle seule le détour. Après Grave (Julia Ducournau), l’an passé, la jeune génération, qui plus est féminine, ne manque pas d’audace. Une bonne nouvelle pour le cinéma de genre français. Si l’action proprement dite ne brille pas par son originalité, Coralie Fargeat en maîtrise parfaitement les ressorts. Certes, la fin tire quelque peu en longueur mais l’ennuie n’a pas le temps de s’installer. Mais voilà, il y a une tache indélébile qui vient contrarier notre plaisir. Le jeu des trois acteurs masculins sonne indéniablement faux. Dès qu’ils ouvrent la bouche, difficile d’être terrorisé par leurs menaces, ou de rire aux répliques clamées au second degré. Une distance se crée alors avec un récit qui perd une bonne partie de sa dimension corrosive. Néanmoins, voici une réalisatrice à découvrir et surtout à suivre.