Une réussite qui se dégage du commun des « biopic » par son regard sensible et intime de l´icône.
En surface, My Week with Marilyn se fait l’écho d’une des rencontres artistiques les plus médiatisées et attendues des années 50. D’un côté Marilyn Monroe, l’icône hollywoodienne, la star et la femme la plus désirée au monde. De l’autre Laurence Olivier, véritable légende du cinéma et du théâtre anglais, acteur, réalisateur et metteur en scène de génie. Le résultat, on le connaît, il ne fut pas exactement à la hauteur des attentes espérées. Le Prince et la Danseuse (1957) est la réalisation la moins intéressante d’Olivier, un film un peu poussif sans être désagréable mais qui par la prestation touchante de Marylin Monroe trouve finalement une grâce inattendue.
Le film de Simon Curtis va explorer dans le détail les raisons de ce rendez-vous manqué en adaptant le livre de Colin Clark The Prince, the Showgirl and Me. Ce dernier, à l’époque jeune assistant réalisateur, s’attira la confiance de la star, devenant son confident sur un tournage hostile, la découvrant ainsi dans son intimité, ses doutes et contradictions. C’est donc à travers le regard émerveillé du jeune homme (Eddie Redmayne très bon et attachant) que nous allons découvrir les coulisses prestigieuses du tournage. Sous les paillettes les véritables enjeux se révèlent. Marilyn Monroe face à Laurence Olivier, c’est la confrontation entre deux philosophies du jeu d’acteur. Marylin Monroe représente le talent brut, l’instinct et la mise à nu absolue face à un rôle qu’elle doit ne doit pas s’approprier, mais devenir. À l’inverse Laurence Olivier symbolise lui la rigueur du théâtre, du travail, du respect du texte, et où l’acteur doit savoir se plier à toute la gamme de personnages qui lui sont proposés sans rien trouver à y redire. Kenneth Branagh excelle en Laurence Olivier (dont on l’a souvent rapproché dans la réalité), lui-même artiste narcissique et orageux et qui va se trouver autant excédé que fasciné par les caprices et l’aura de sa star. Le récit distille sobrement quelques pistes sur son désir supposé et rapidement refroidi de séduire Marilyn comme cause de la collaboration compliquée qui s’en suivit.
L’attraction principale est bien évidemment de retrouver Michelle Williams en Marilyn. L’actrice a tout compris à la manière d’incarner l’icône. Plutôt que de vainement rechercher le mimétisme physique d’une star à l’image si marquante, l’actrice en explore une facette plus secrète. Pour Marylin Monroe, son physique de rêve aura toujours été un atout et une malédiction. Norma Jean aura réussi à attirer tous les regards sur elle en se réinventant en Marilyn, mais y perdait au passage le respect et la crédibilité artistique due à n’importe quelle star de ce calibre. De ce fait, c’est une femme constamment en plein doute sur ses capacités, son talent, et finalement plus perfectionniste et sujette à la remise en question qu’il n’y paraît. Curtis montre bien cela lors d’orageux échanges où Olivier enrage des modifications qu’elle exige de « son » texte, de sa manière de se réfugier dans la Méthode afin de rendre son personnage le plus proche possible d’elle. Michelle Williams fait merveilleusement transparaître toutes ces nuances, la fragilité et la candeur de Norma Jean (la scène de baignade merveilleuse) alternant avec les minauderies et le numéro de charme constant de Marylin. L’empathie fonctionne parfaitement avec un Colin subjugué, amoureux, mais qui va rapidement se confronter aux contradictions de la star, qui totalement naturelle peut dans l’instant suivant se métamorphoser et prendre des poses sexy pour les photographes. Cette dualité ne va pas sans dégâts, et les addictions qui perdront Marilyn forment une sorte de continuité funeste où l’intrigue se voit rythmée par ses différentes crises.
En choisissant de s’attarder sur un moment et non sur une vie entière, My Week with Marilyn évite les clichés inhérents à d’autres biopic plus amples mais bardés de tics narratifs qui alourdissent désormais le genre. On saisit des figures célèbres pour un court instant puis on les laisse repartir vers leur destinées tragiques (on pense aussi à la superbe Vivian Leigh vieillissante incarnée par Julia Ormond) et glorieuses, sans perdre de leurs voiles de mystères.