La Science Fiction

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La science fiction est un genre délicat, à ne pas mettre entre les mains de tout le monde.

Un monde exigeant qui s’adresse à un public exigeant, en même temps qu’il s’en émancipe de par son désir d’absolu. A chaque nouveau roman, à chaque nouveau film, vous voilà aux portes d’un univers qui fouillera du côté de votre essence. L’ontologie, le questionnement de l’être à travers sa projection sont toujours à l’honneur. Philippe K. Dick, Orson Scott Card et les autres ne sont jamais très loin. Mais les lecteurs sont nombreux et les amateurs ne s’y trompent plus. Il y a des codes à respecter. On peut les détruire, les polir, les décorer, ou bien encore tenter d’en recréer, on peut refaire du neuf avec du vieux… Bref, comme dans tout genre, on peut faire avancer, sous prétexte de respecter la seule et unique règle qui importe : ne pas perdre l’humain en route. Car c’est avant tout de cela dont il s’agit lorsque l’on parle de SF. La technique, le progrès, l’avenir de l’homme sans cesse confrontés à cette même quête de sens d’existence.

Les 5 films dont il sera question dans cette thema sont de qualités inégales, quoi qu’aucun ne soit à jeter. Le chef d’œuvre absolu d’abord : 2001, opéra grandiose, fresque sur l’humain envisagé comme cycle, l’humain comme éternel recommencement qui n’aura jamais les moyens de son ambition d’immortalité. Le monolithe y est un guide autant qu’un objet de frustration. La technique y est un leurre en même temps qu’une lumière, un faux Dieu.  En 1968 toujours, La planète des singes. Un film plus commercial, devenu culte et ayant fait l’objet d’innombrables suites. La violence intrinsèque de l’homme y est brandie comme la cause de la suprématie des singes.

En 1972 ensuite, bien au-delà du remake de Soderbergh trente ans plus tard, Solaris, de Andreï Tarkovski, dépoussière encore un peu davantage le genre de la science fiction, le détournant même suffisamment pour composer un poème dédié à l’Homme et à sa place dans l’univers.

Puis vient le chef d’œuvre de Ridley Scott, en 1982. Blade runner témoigne certes de quelques problèmes de rythme, mais il s’agit là d’une des œuvres les plus hypnotiques proposées par le cinéma américain. En filigrane du sempiternel combat entre l’homme et la machine, surgit un vieux débat philosophique opposant nature et technique. La machine, prolongement de l’homme qui se retourne contre elle, car bien sûr les sentiments dominent l’homme et constituent son essence.

Abyss  enfin, réalisé en 1988 par James Cameron. A nouveau plus commercial, il n’en reste pas moins bien maîtrisé, ménageant jusqu’au bout le suspense. L’humain confronté à une force mystérieuse. Explorer les fonds marins devient une occasion pour l’homme de s’explorer lui-même. Là encore, la leçon faite à l’humanité passe par sa rencontre avec l’inconnu.


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