Hancock

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Un point de départ enthousiasmant qui n’empêche toutefois pas le film de s´essouffler. Hancock est un bon divertissement, plein de cette folie des années 80 – 90 où le cinéma parvenait encore à conjuguer qualité et souci de rentabilité.

Sorte de Charles Bukowski volant, invincible et immortel, Hancock le nihiliste carbure au whisky et ne respecte pas grand chose. Si ses pouvoirs lui permettent de sauver des vies et d’arrêter des criminels, il n’en demeure pas moins que son sale caractère ainsi que les dégâts incommensurables qu’il provoque lors de ses interventions, ne font qu’attiser la haine que les habitants de Los Angeles lui témoignent ouvertement. A quoi bon se soucier d’autrui quand on vole ten miles au-dessus des lois ? C’est lorsqu’il rencontre Ray Embrey, un spécialiste des relations publiques, que l’attitude d’Hancock prend un tournant radicalement différent. A l’initiative de Ray, Hancock décide d’assumer ses actes, de payer pour toutes les destructions qu’il a commises, et de se rendre en prison. Deux semaines plus tard, en son absence, la criminalité a augmenté de 30%, et le chef de la police fait appel à lui. Notre super-héros part donc à la conquête d’une reconnaissance méritée : être détesté et marginalisé n’est pas si facile au quotidien…

Malgré son invincibilité quasi-totale et ses airs de brute taciturne, il y a quelque chose de brisé chez Hancock, une fêlure, qui l’amène à vouloir être aimé. Le film, sous ses dehors drôles et légers, traite en fait d’un important désir universel, celui de ne pas être seul. Déjà Isaac Asimov, dont Hollywood avait adapté plusieurs nouvelles pour tourner I, Robot (Alex Proyas) avec, là encore, Will Smith dans le rôle principal, se demandait pourquoi, enfermés dans le noir, les robots se regroupaient et se resserraient entre eux, comme pour se rassurer. Cette envie de ne pas rester à la marge, d’être reconnu, d’être intégré à la société, et de pouvoir se placer ou se singulariser par rapport aux autres, est au coeur d’Hancock. Malheureusement, ce sujet de réflexion, plutôt intéressant en soi, est loin d’être assez exploité dans le film de Peter Berg.

Le brusque changement d’Hancock (qui au début du film a l’air de plutôt bien vivre avec lui-même), cette soudaine envie de reconnaissance, est expliquée plus tard, mais maladroitement. L’idée n’est pas assez creusée, comme tant d’autres choses dans ce film, et notamment les personnages (tous un peu trop linéaires) ou, ce qui aurait été le plus intéressant, cette histoire mythologico-mystique d’un amour impossible à la Roméo et Juliette. Dommage en effet de n’avoir pas plus mis en rapport l’envie de sociabilité d’Hancock avec l’idée que quelque chose lui manque. Il aurait mieux valu détailler un peu plus l’histoire – quitte à troubler le spectateur – afin de la rendre plus intéressante et d’éviter tous ces appels d’air jamais comblés. Il semble que les scénaristes – et le réalisateur avec eux – aient été bien trop passionnés par leur point de départ (l’idée de ce clochard aux supers-pouvoirs), pour ne pas commettre certaines négligences dommageables quant à l’intérêt que l’on peut porter au film. Hancock raconte pourtant l’histoire d’un homme qui se trouve, qui se découvre, et dont le désir est d’être au monde – presque un film sur l’adolescence, donc. Malheureusement, après quelques gags bien sentis, de jolies scènes d’action, et un retournement de situation plutôt bien trouvé, Hancock finit par s’essouffler et perdre un peu de sa folie originelle. Peut-être que si les producteurs du film avaient eu moins peur de conserver jusqu’au bout l’esprit de la première moitié d’Hancock, nous aurions pu avoir un divertissement aussi bon que, par exemple, Retour vers le futur de Robert Zemeckis.

Il reste que, comme le disait Bertrand Tavernier, le cinéma US n’a jamais autant été le cinéma de l’affirmation de soi, du oui au monde. Là où le cinéma européen continue de douter de tout, Hancock est souriant et optimiste à souhait. On parle peu du pays – malgré quelques petites références à peine effleurées (la criminalité, la guerre en Irak, les procès contre McDonald…) – pour se concentrer sur l’envie qu’a un peuple de se reposer sur un seul homme – héros de préférence – de cristalliser sur un être “fort” son désir de puissance et de protection. Il faut également rappeler que les Etats-Unis ont une longue tradition de super-héros (Robocop, Terminator, Batman…), encore très présente aujourd’hui (Transformers, Iron Man, et bientôt un autre Hulk…), qui ne fait qu’alimenter le même fantasme : celui du surhomme, de la super-puissance… Sans doute cela traduit-il une peur du monde extérieur ; après tout, à aucun moment Hancock ne fait référence à ce qui se trouve au-delà des Etats-Unis… En fin de compte, donc, tout film, quel qu’il soit, même s’il n’a aucune prétention sociologique, fournit des informations sur la société qui, à un temps donné, le produit.

Titre original : Hancock

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Durée : 100 mn


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