« On body and soul » et « Félicité ». Deux films d’amour, filmés par la cinéaste hongroise Ildiko Enyedi et le réalisateur franco-sénégalais Alain Gomis.
La poésie envoûtante du film hongrois On body and soul
Une histoire d’amour racontée dans un abattoir? Tel est l’improbable défi lancé par la réalisatrice hongroise Ildikó Enyedi. Dans un monde cruel où le sang de boeuf coule tous les jours, elle nous amène dans un récit hors temps. Toute en douceur, le film entremêle rêve et réalité.
ldikó Enyedi nous offre un conte sur notre besoin éternel d’aimer et d’être aimé. La mise en scène de cette histoire d’amour étrange est d’une beauté absolue. Elle se tisse entre le directeur financier vieillissant de l’abattoir et la nouvelle recrue, très rigide, chargée du contrôle de qualité de la viande. Dans la vie quotidienne de l’abattoir règne le malaise entre les deux personnages. Dans la nuit, ils se retrouvent dans leur rêves. Lui dans le corps d’un cerf, elle dans celui d’une biche au plein milieu d’une foret hivernal vierge. Ici, les deux âmes si solitaires peuvent finalement s’ouvrir, s’aimer.
On body and soul, Compétition 2017
Le visage de Félicité illumine l’écran
Réalité et rêve se confondent, quand Félicité chante la vie, dans un petit bar lugubre de Kinshasa. Elle est la reine de la nuit dont la voix rauque et chaleureuse a le don d’ensorceler ceux qui l’écoutent. Dès la première scène, le réalisateur franco-sénégalais Alain Gomis nous plonge dans une atmosphère de joie sauvage et effrénée. La camera danse librement avec les corps qui flirtent et s’aiment.
Le visage de Félicité nous parle de sa grande fierté et de son indépendance. L’actrice congolaise, Véro Tshanda Beya illumine l’écran. Dans le film elle chante pour sa dignité et pour la vie de son fils, qui attend à l’hôpital son opération, suite à un accident de moto. Mais Félicité n’a pas l’argent pour payer cette opération. Un cheminement âpre à travers la capitale du Congo commence alors. Le parcours de Félicité nous plonge de manière quasi documentaire dans les quartiers du Kinshasa contemporain. Alors que la tragédie se déroule sous nos yeux, bien qu’à bout de forces, Félicité restera toujours animée par l’amour de son fils et ne perdra jamais sa dignité. Alain Gomis signe un film hybride mélangeant aspects documentaires et oniriques, porté par l’énergie singulière de son actrice hors du commun.
Merveilleusement servi par des interprètes de premier plan (Gene Tierney, Rex Harrison, George Sanders) sur une musique inoubliable de Bernard Herrmann, L’Aventure de Madame Muir reste un chef d’œuvre inégalé du Septième art, un film d’une intrigante beauté, et une méditation profondément poétique sur le rêve et la réalité, et sur l’inexorable passage du temps.
Autopsie grinçante de la « dolce vita » d’une top-modèle asséchée par ses relations avec des hommes influents, Darling chérie est une oeuvre générationnelle qui interroge sur les choix d’émancipation laissés à une gente féminine dans la dépendance d’une société sexiste. Au coeur du Londres branché des années 60, son ascension fulgurante, facilitée par un carriérisme décomplexé, va précipiter sa désespérance morale. Par la stylisation d’un microcosme superficiel, John Schlesinger brosse la satire sociale d’une époque effervescente en prélude au Blow-up d’Antonioni qui sortira l’année suivante en 1966.
En 1958, alors dans la phase de postproduction de son film et sous la pression des studios Universal qualifiant l’oeuvre de « provocatrice », Orson Welles, assiste, impuissant, à la refonte de sa mise en scène de La soif du mal. La puissance suggestive de ce qui constituera son « chant du cygne hollywoodien » a scellé définitivement son sort dans un bannissement virtuel. A sa sortie, les critiques n’ont pas su voir à quel point le cinéaste était visionnaire et en avance sur son temps. Ils jugent la mise en scène inaboutie et peu substantielle. En 1998, soit 40 ans plus tard et 13 ans après la disparition de son metteur en scène mythique, sur ses directives, une version longue sort qui restitue à la noirceur terminale de ce « pulp thriller » toute la démesure shakespearienne voulue par l’auteur. Réévaluation…
Lundi 7 juillet, au cours d’une cérémonie à la cinémathèque française, un long métrage et un court métrage se verront attribués le prix Jean Vigo, 2025. Wang Bing sera également récompensé pour l’ensemble de son œuvre.