Au Collège des Bernardins, plus besoin d´écran: le cinéma est dans la salle!
Une drôle d’expérience se déroule en ce moment dans les confins gothiques du Collège des Bernardins à Paris. Passée la vaste et très lumineuse nef et quelques marches descendues, le noir total attend le visiteur au bout d’un couloir. L’effet de surprise passé, on se risque à avancer à tâtons d’abord vers le centre de la pièce où quelques lignes blanches s’entrelacent sur le sol. Depuis le plafond, deux projecteurs vidéo dessinent lentement quelques formes blanches sur le sol : un cercle semble se former d’un côté, tandis qu’une croix ou le symbole de l’oméga apparaît de l’autre. Dans cet espace pourtant vide, seulement peuplé par les projections et une légère brume, le déplacement est d’abord malaisé. Lentement, on avance, la main devant soi pour éviter de percuter un autre visiteur ou de se cogner contre un mur (c’est fou ce qu’il peut y avoir comme murs dans une salle vide !). Moins que spectateur, c’est en explorateur qu’Anthony McCall nous transforme. C’est véritablement de découverte, d’acclimatation et de rencontre qu’il s’agit ici.
Si c’est le corps entier qui est engagé (se déplacer, circonscrire l’espace, traverser le cône lumineux de la projection…), l’expérience va aussi se concentrer sur le regard. Passée l’impression première de noir total, l’espace se révèle peu à peu à nous, nos yeux s’habituant à la pénombre, l’espace finissant par apparaître comme très lumineux après quelques minutes dans l’exposition. A l’incertitude des débuts succède alors l’aisance et le plaisir quasi enfantin du jeu avec les lignes mouvantes au sol et les cônes lumineux qui découpent la pièce.
Si l’on n’est pas dans le cadre rassurant de la salle de projection, c’est pourtant bien de cinéma qu’il s’agit. Pas de siège – et donc pas de position assignée au spectateur – pas d’écran, mais des films chez Anthony McCall, cinéaste connu aussi bien du milieu des musées que de celui du cinéma expérimental. Depuis Light Describing a Cone en 1973, il pratique ce qu’il appelle les "solid light films" (films de lumière solide). Dans ses projections sans écran, le film est envisagé à la fois comme un objet et comme un espace : le cône de projection – ce halo de lumière qui passe au-dessus de nos têtes dans la salle de cinéma et transporte les images du projecteur vers l’écran – devient une sculpture immatérielle avec la tentation de le toucher, le traverser… Chez McCall, le film s’apparente autant, si ce n’est plus, à ce qui se déroule dans la salle qu’à ce qui est projeté. Dans l’une de ses expériences les plus radicales, Long Film for ambient light (1975), le film et le projecteur avaient même disparu au profit de la confrontation entre l’espace, la lumière et le spectateur.
Between You and I, le titre de l’installation au Collège des Bernardins, fait bien sûr référence aux deux formes qui se développent et se répondent au sol, mais aussi à la rencontre entre le spectateur et la projection. Dans le « cinéma élargi » (1) d’Anthony McCall, le film n’est plus sur l’écran mais dans la salle, il n’est plus une direction vers laquelle tourner son regard mais une expérience à vivre. La présence du spectateur est ainsi directement intégrée à l’œuvre : il vient habiter le film, lui donner une existence. Autant que les projections, ce sont les autres spectateurs qui attirent notre attention : des formes qui se dessinent à contre-jour, quasi anonymes dans l’obscurité. L’expérience de Between You and I a quelque chose de troublant, de mystérieux et de poétique à la fois. Désorienté par le dispositif, on se raccroche à ce qui est immédiatement visible – les formes naissantes au sol et le cône lumineux – et à ses propres sensations. L’installation agit tel un miroir grossissant entre l’aspect ludique de l’expérience, la résurgence de peurs qu’on croyait oubliées et le surgissement de sensations inattendues. Une proposition à la fois minimale et intense.
L’expérience se poursuit jusqu’au 16 avril 2011, et c’est gratuit !
(1) Cinéma élargi est la traduction du terme expanded cinema, popularisé par l’ouvrage éponyme de l’historien et théoricien du cinéma Gene Youngblood paru en 1970, et qui regroupe les pratiques cinématographiques qui modifient le dispositif traditionnel de projection (multi-écrans, projection hors de la salle obscure, autres types de support de projection…)
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