Maryam, fille de l’imam du quartier, attisée par le bonheur nocturne de l’Occident et ses travers, voit sa vie bouleversée par un avortement. Ismaël, officier de police qui a perdu la foi depuis une dramatique bavure, quitte sa famille pour une clandestine. Et enfin Sammi, jeune Africain pratiquant voit sa vie troublée par l’arrivée de nouveaux désirs pour Daniel. À travers ces trois portraits, Qurbani fait le constat de l’intégration musulmane en Allemagne, de l’importance de la religion, mais aussi de la survie dans un univers pas toujours docile.
Derrière ce film choral, il y a toute une référence au Babel de Iñárritu, les stars et la mondialisation en moins. Mais ici, c’est tout un microcosme qui éclot sous l’œil du réalisateur, avec ses avantages et ses inconvénients. Car même s’il parvient à s’accaparer une certaine vision de l’islam, le film s’engouffre peu à peu dans une métaphysique extrémiste. Maryam, après l’avortement, devient la plus fervente pratiquante de la mosquée, allant jusqu’à proférer des paroles plus dures que celles de son père et à avoir des hallucinations religieuses. Ismaël, après avoir trompé sa femme, revient dans le domicile conjugal, le retour de la croyance appelant chez lui un retour aux origines. Quant à Sammi, que sa mère accuse d’homosexualité, il parvient à se pardonner et se comprendre grâce aux paroles de l’imam.
Dans le Coran, la Shahada est le passage qui explique la compréhension et le pardon de Dieu. Dans le film, ce n’est pas tant le pardon d’un être supérieur que cherchent les protagonistes, mais leur propre pardon. Celui que l’on s’accorde à soi-même, après avoir mal agi. Berlin est la ville parfaite pour raconter cette histoire, cherchant elle-même depuis la Seconde Guerre mondiale, à travers sa perpétuelle reconstruction, un pardon aussi bien culturel, politique, que religieux. On regrette d’ailleurs le manque d’exploitation de ce décor si grisâtre, qui résume à lui seul le sentiment de tous les personnages. La ville paraît oubliée, écran de fumée que l’on parvient à peine à discerner, si bien que située à Berlin ou ailleurs, cette histoire se voulant universelle ne l’est finalement pas. Et la mise en scène classique de Qurbani n’aide en rien à relever le film vers autre chose qu’un simple pamphlet sur la religion et l’intégration de la population musulmane en Allemagne. Shahada veut comme Babel embellir un cinéma se voulant humaniste, mais rejoint finalement les œuvres que l’on peut qualifier de passables.