Cannes Jour 2 : Des salles obscures à la plage

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Un certain regard sur Un certain regard…

On l’a brièvement évoqué, la sélection Un certain regard présente une ribambelle de films venus du monde entier souvent pertinents, toujours intéressants. Hier soir, c’était la cérémonie d’ouverture de la compétition. Roulements de tambourin. Moins de glamour et de fanfaronnades que la veille pour la sélection officielle avec une timide introduction du jury présidé par Emir Kusturica, constitué notamment d’une Elodie Bouchez au bronzage déjà efficace, ce qui lui permettra de voir les vingt films proposés l’esprit libéré. Après une sobre intervention de Thierry Frémaux, Gus Van Sant peut enfin honorer la soirée avec le délicat Restless comme film d’ouverture.

Mais avant de parler du film, ne perdons pas de vue que Cannes, c’est aussi du folklore qu’il faut raconter sous peine de passer complètement à côté de l’exercice du carnet de bord du Festival palmé. Chaque jour sur la Croisette a son lot de rencontres impromptues, de situations absurdes et bien sûr de répliques savoureuses. Tôt le matin, en traversant le marché de fruits et légumes pour aller au marché du film, on peut intercepter une conversation entre deux représentantes du troisième age et entendre une de ces tirades exclusivement cannoises : « Ma fille s’appelle Romy, mon fils Gérard-Philippe, tout attaché. » Autre endroit, même esprit d’un autre monde. Comme il est de coutume, après avoir retiré son accréditation, des hôtesses installées à la sortie du bureau officiel nous proposent une bouteille de San Pellegrino. Après tout, pourquoi pas, il fait chaud, elle pourrait nous être utile. Excepté pour cette jeune demoiselle mi-comédienne inconnue, mi-starlette bientôt connue qui osera une interrogation existentielle : « Vous auriez de la Quézac ? » Au Festival de Brest peut être…

Chaque jour a son lot d’anecdotes qu’on se fera une joie amusée et un devoir professionnel de vous transmettre. Et sinon Restless ? Une fois n’est pas coutume, un film labellisé Un certain regard est décevant voire irritant. Une comédie romantique autour de la mort et du deuil entre un adolescent devenu orphelin squattant les enterrements et une jeune fille malade qui n’a plus que trois mois pour profiter de la vie interprétés par Henry Hopper, le fils de Dennis, et Mia Wasikowska (Alice chez Burton). Sur un ton lancinant et enfantin, la musique, inutile et constante, achève l’espoir entrevu au début du film. Les quelques fulgurances drôles et touchantes provoquent même une extrême frustration. Gus Van Sant avait bien de la matière à faire un film bouleversant mais aplati son propos par trop de mièvrerie attendue. Chose rare à Cannes devant des films d’auteurs généralement maîtrisés, le récit peut être anticipé par un simple enfant à la vue du premier quart d’heure de film. Aucune surprise, ni prise de risque, à se demander si la sélection de ce film n’est pas due au nom brillant et excitant de son réalisateur. Heureusement, à Cannes, un film est vite remplacé par un autre permettant nos émotions de virevolter entre les différentes salles de projection. Ah et sinon, le Woody Allen n’est toujours pas un chef d’œuvre et certains journalistes en sortie de projection s’enflamment déjà sur une éventuelle palme d’or promise à We want to talk about Kévin de Lynne Ramsay alors que le Festival n’a commencé que depuis deux jours. Cannes, quoi…


© Lætitia Lopez

Précédemment, dans notre saga cannoise :  Article de présentation / Arrivée sur la Croisette.
 

 
 


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