Blind Date (Boire et déboires), qui sort dans les salles américaines le 27 mars 1987, a été décrit par certains critiques comme « le gag parfait ». Au coup de folie alcoolique de Nadia Gates, succède celui de Walter, excédé par la tournure prise par la soirée. Mais en matière de délires, les deux tourtereaux sont largement supplantés par celui de l’ancien petit ami de Nadia. Sa spécialité : encastrer sa voiture dans les vitrines des magasins quand il est à la poursuite de sa dulcinée. Blind date pourrait être considéré comme le pendant burlesque – un genre dans lequel le dépressif chronique Blake Edwards est passé maître – du drame Le Jour du vin et des roses (Days of wines and roses, 1961), qui traitait aussi de l’alcoolisme. La Grande course autour du monde (The Great race, 1965), The Party et la série des Panthère Rose (le premier date de 1963) sont quelques unes des illustrations les plus marquantes du talent du fan de Laurel Hardy en la matière.
L’équilibre comique de Boire et déboires repose sur l’alternance chaos / calme. Sous les brumes de l’alcool, Nadia Gates s’avère outil d’émancipation pour Mme Yakamoto, traitée en femme-objet par son époux, et révèle Walter à lui-même : il avait choisi la finance au détriment de sa passion pour la musique et la guitare. Et sa garde-robe en témoigne. Mal fagoté en costume, il s’en libère tout au long du film pour finalement retrouver un look décontracté, plus conforme à sa fibre artistique. Si la mécanique Boire et déboires fonctionne, il n’en demeure pas moins que ce film constitue une œuvre secondaire dans la filmographie de Blake Edwards dans les années 80. Cette décennie sera surtout marquée par des films comme Elle (1979), où il donne sa chance à Bo Derek, qui y incarne le fantasme d’un séducteur vieillissant, S.O.B (1981), où il règle ses comptes avec Hollywood et la comédie de travestissement Victor/Victoria (1982). Mais il y a surtout That’s life (1986), qui s’apparente à une autobiographie cinématographique dans laquelle son ami Jack Lemmon incarne un homme atteint d’un cancer qui s’interroge sur sa mort prochaine. Sa femme aimante est bien évidemment incarnée par Julie Andrews, dont Blake Edwards s’est évertué durant sa carrière à effacer l’image lisse héritée de Mary Poppins (1964) et La Mélodie du Bonheur (The Sound of music, 1965) depuis leur première collaboration, Darling Lili (1970). Dans l’univers edwardsien, elle fut souvent celle qui ne faisait pas rire. Bien au contraire. Le personnage de Kim Basinger dans Boire et déboires en devient d’autant plus singulier.