Artémis cœur d’artichaut est charmant sans convaincre tout à fait, trop occupé à recycler les références explicites à la Nouvelle Vague sans parvenir à trouver son ton propre : Godard pour le côté organisé à la volée autour d’un thème de base, Rohmer et Rozier pour les scènes de copines entre elles à la plage. À la vision du film vient également à l’esprit le très beau court de Sophie Letourneur, Le Marin masqué (2012) : même esthétique, même utilisation du noir et blanc et du Super 8, mêmes conversations a priori d’une grande banalité. C’est pourtant dans les dialogues que Artémis puise ses plus jolis moments, comme la rencontre des deux filles au resto U, pure séquence d’énergie qui témoigne de la bonne santé de la débrouille – que certains se mettent aujourd’hui à appeler le « nouveau cinéma français », avec des cinéastes comme Antonin Peretjatko (La Fille du 14 juillet, 2013), Benoît Forgeard (Réussir sa vie, 2012) ou encore plus récemment Justine Triet (La Bataille de Solférino, 2013), qui n’attendent pas d’avoir un budget conséquent pour se mettre à tourner.
Hubert Viel est de ceux-là : autoproduit à 90%, son Artémis a le goût d’un certain système D, fait de peu de répétitions, sans coach d’acteurs, sans script et sans assistant réalisateur. S’en dégage, dans ses meilleurs moments, une vitalité assez réjouissante faite accidents qui font que le film respire. Et si le tout ne fonctionne pas toujours (le narrateur omniscient, Viel lui-même, qui apparaît à l’écran ; certaines voix off), sa recherche de l’originalité à tout prix le desservant parfois, l’ensemble est pourtant suffisamment fou et enlevé pour que l’on attende avec curiosité le prochain vrai long de Viel qui, après nous avoir fait croire à son histoire, laisse sa fin ouverte et invite élégamment à imaginer ce que l’on veut.