Chroniques de Cannes 2021 : Jour 9

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Plongée au coeur du Festival de Cannes 2021.

Une métaphore de toute société influencée par les réseaux sociaux

C’est un beau jour d’été ensoleillé qui commence aujourd’hui sur Cannes. Le vent est tombé et un soleil doublé d’un petit zéphyr accueille cette journée particulière de fête nationale. Mais à Cannes, rien ne change. La foule des festivaliers grouille devant le palais semblable de plus en plus à une forteresse imprenable avec ses gardes et ses tours de guet, genre Désert des Tartares… Dès 9 heures, dans la grande salle Louis Lumière, on se rattrape sur les films des montées des marches de la veille. Ainsi, je peux découvrir Ghahreman (Un héros) de Asghar Farhadi dont la durée et la lenteur déconcertent un peu. On retrouve bien sûr la veine qui fait le charme de son cinéma assez statique et un peu bavard. Rahim est en prison à cause d’une dette qu’il n’a pas pu rembourser. Lors d’une permission de deux jours, il tente de convaincre son créancier de retirer sa plainte contre le versement d’une partie de la somme. Mais les choses ne se passent pas comme prévu… Le film débute justement par la mise en place de ce personnage que l’on voit quitter la prison, prendre un taxi et se rendre devant de magnifiques vestiges (on apprendra peu après qu’il s’agit du tombeau de l’empereur Xerxès) dont il franchit d’une manière appuyée tous les échafaudages pour échanger quelques mots avec son beau-frère, puis redescendre et se rendre dans la ville qui va alors lui servir de labyrinthe. C’est dans cette ville des tapis, Chiraz, que se déroule cette métaphore sur la justice iranienne, l’occasion d’y découvrir les rouages de la société, les petits marchés et les intérieurs iraniens, ainsi que la structure familiale compliquée. Un film qui rappelle par certains côtés ceux de son illustre prédécesseur, Vittorio de Sica, mais malheureusement un peu privé de pathos, ce qui en fait un film finalement assez austère, ainsi que le définit Thomas Sotinel du Monde : « C’est ici la géométrie du schéma social qui l’emporte sur la douleur des hommes et des femmes. »

 

Porn’, rock and roll and adrénaline

Pas le temps de marcher sur la plage, juste celui d’avaler un sandwich à la buvette pour découvrir Red Rocket de l’Américain Sean Baker qui vient de gravir les marches avec toute son équipe. Il est accueilli par des torrents d’applaudissements nourris dès son entrée. Il faut dire qu’il est le créateur de la série Greg the Bunny, et qu’il s’est illustré avec deux prix pour ses deux films Prince of Broadway et Tangerine. Il avait en plus présenté The Florida Project dans le cadre de la Quinzaine des réalisateurs au 70e festival de Cannes. Il revient ici sur ses terres, avec un film maîtrisé, déjanté et parfois poétique. Il fallait le faire car le sujet est assez trash, mais il est servi par des acteurs prodigieux, Simon Rex, Suzanna Son et Bree Elizabeth Elrod ici présents. Mikey Saber revient dans sa ville natale du Texas après des années de carrière de pornstar à Los Angeles. Il n’y est pas vraiment le bienvenu… Sans argent, sans emploi, il doit retourner vivre chez son ex-femme et sa belle-mère… Pour payer son loyer, il reprend ses petites combines mais une rencontre va lui donner l’espoir d’un nouveau départ.

 

 

La qualité made in France ?

En compétition aussi, le film The story of my wife d’Ildiko Enyedi, avec montée des marches et tout le tralala. Hélas, impossible d’entrer, et demain ce ne sera pas possible non plus. C’est ça la triste réalité cannoise souvent bien frustrante. Mais on ne peut pas tout voir, il faut se répéter ça comme un mantra. Jacob est capitaine au long cours. Un jour, il fait un pari avec un ami dans un café : il épousera la première femme qui en franchira le seuil. C’est alors qu’entre Lizzy…

Nous reviendrons demain sur la présentation en compétition officielle de Jacques Audiard dont c’est le grand retour à Cannes, après la Palme d’or pour Dheepan en 2015, avec ce film étonnant qui va marquer les esprits, tourné en noir et blanc artistique dans le quartier pourtant très moche des Olympiades à Paris et qui donne son nom au film, Les Olympiades.

Je m’aperçois qu’on n’a pas parlé ici de Bac Nord, le film de Cédric Jimenez présenté hors compétition lundi 12 juillet avec Gilles Lelouche, François Civil et Kenza Fortas. En 2012, dans les quartiers Nord de Marseille détiennent un triste record : la zone au taux de criminalité le plus élevé de France. Poussée par sa hiérarchie, la BAC Nord, brigade de terrain, cherche sans cesse à améliorer ses résultats. Dans un secteur à haut risque, les flics adaptent leurs méthodes, franchissant parfois la ligne jaune. Jusqu’au jour où le système judiciaire se retourne contre eux… Il va certainement cartonner en salles.

Il faut reconnaître la grande qualité, voire la virtuosité, du magnifique film de Mathieu Almaric, Serre-moi fort, présenté dans la section Cannes Première et qui a dû patienter un an avant de venir à Cannes, puisque la cuvée 2020 a été annulée pour cause de covid. Tiré de la pièce Je reviens de loin de Claudine Galea, ce récit au montage incroyable accompagné d’une musique magnifique au piano en hommage à est un pur bijou auquel on souhaite tout le succès qu’il mérite déjà. Il faut s’accrocher certes car cette histoire d’une femme qui fuit son foyer raconte hélas aussi une tout autre histoire. Ce sera ma palme à moi, même si le film n’est pas en compétition officielle. Mais depuis Tournée, on sait que Mathieu Almaric est un grand réalisateur, aidé ici par son équipe technique bien sûr et de ses deux acteurs, Vicky Krieps et Arieh Worthalter.

Le Prix Nespresso de la Semaine de la Critique

Le festival semble aller lentement vers sa clôture. Demain nous reviendrons sur les autres sélections. Mais déjà, que se passe-t-il côté Semaine de la Critique qui se termine sur sa remise des prix. Et le grand prix Nespresso revient à Feathers (Plumes) d’Omar El Zohairi. Nous y reviendrons demain avec de nouvelles aventures. Belle journée à vous en espérant que, comme ici, elle sera ensoleillée.


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