Ah ! La libido, on ne sait pas si on doit entendre ce titre comme un cri de joie, d’anéantissement ou de peur. Le film de Michèle Rosier joue sur les différentes registres du plaisir sexuel à travers ses quatre personnages : l’orgasme comme objectif ultime ou comme illusion, le plaisir féminin n’est plus tabou, mieux encore, il est le moteur d’un film. Quatre femmes pour quatre générations : l’orgasme court sur toutes les lèvres. Leitmotiv d’un film pourtant dénué de sens tant il confère à ses personnages une sympathie niaise et creuse. Stéréotypes sur pattes, chacune d’entre elle est une carcasse vide. L’épaisseur d’un personnage ne se manifeste pas d’un coup d’un seul, encore faut il aller chercher un peu plus loin que les simples discours ultra-référencés (citations à perte de vue chez la plus âgée d’entre elles). Alors, sont-elles des motifs neutres véhiculant des idées féministes ? C’est-à-dire que le symbole se substituerait au personnage. Non, bien sûr, sinon pourquoi se donner une telle peine à confronter des âges différents, des pensées différentes (si tant est qu’elles en aient une), et des valeurs différentes… Tout est tellement lisible, évident, la subtilité aurait disparu du cinéma comme par enchantement, ses aspérités avec. Ces quatre femmes, travaillant chacune à un poste différent du quotidien Libération, partent donc à la recherche du plaisir. Initiées par l’une d’entre elle, leur méthode est simple : aller rendre visite à des « toy boys », des prostitués hommes. On pourrait décomposer le film en trois parties : présentation des quatre protagonistes et vagues portraits de chacune pour débuter, viennent ensuite les scènes de lit, et enfin le récit de leurs expériences sur une barque, au beau milieu d’un lac. Et plusieurs péripéties… Comprenez-vous, l’adolescente de 18 ans se voit obligée de chercher la définition d’un «orgasme » dans un dictionnaire, on aura tout vu.
Le registre de la comédie est une bien triste affaire quand il est là pour combler un propos étonnamment vide. Les situations-clichées s’accumulent et fonctionnent comme des passages en force à une explication finale : le plaisir féminin mérite qu’on en parle, pas de distinction homme/femme, l’égalité totale. Ah ! La Libido n’est pas un film sur l’amour, il est un film sur le plaisir. Donnez-nous du plaisir ! veulent crier les quatre femmes, les spectateurs aussi. Néanmoins, la photographie est parfois superbe. D’abord ce salon rouge, feutré, où les « toy-boys » attendent gentiment la prochaine cliente. On y joue aux cartes ou on discute derrière une vitre sans tain, afin que les femmes à la recherche du plaisir inouï puisse faire leur choix en toute tranquillité. Ensuite, cette séquence onirique où la plus jeune des quatre femmes s’imagine comment la rencontre se serait passée si elle avait eu le courage d’y aller : spectacle dansant dans une chambre d’hôtel aux décors orientaux, puis le sauvetage de la demoiselle par les pompiers, le romanesque prend le pas sur le comédie, plus rien n’est drôle ici, tout est vrai et magique, le cliché du beau mec musclé qui sauve la princesse à sa fenêtre se mêle aux féeries dansantes et enfin, la première belle scène arrive. La dernière. Sûrement ce film ne mérite pas tant de reproches, les films ratés, il y en a chaque semaine. Aussi on pourra faire écrire une femme sur ce film, peut-être est-ce une œuvre seulement appréhendable par le sexe féminin… si tel est le cas, Michèle Rosier s’est définitivement plantée. Breillat est certes moins comique, mais tellement plus juste.