Teeth

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Ou l´histoire d´une sainte nitouche se découvrant une petite particularité intime… Audacieux pour les uns, vulgaire pour les autres, Teeth touche de toute manière là où ça fait mal. Dommage que le réalisateur n´ait pas fait preuve de plus de subtilité.

Un film indépendant comme Teeth n’aurait aucun sens s’il n’était pas américain. Dans nul autre pays, on ne trouve cette espèce d’hypocrisie rampante confinant à l’hystérie, concernant les choses du sexe. Qu’importe si presque un tiers des curés yankees se révèlent être pédophiles, ou si les teenagers idolâtrent des popstars bustées comme des actrices de X et qui font de leur vie privée un vaste feuilleton à rebondissements (généralement bien salaces, et visibles sur Internet…). Au pays de l’oncle Sam, pour se donner bonne conscience, on préfère implorer le Christ de pardonner nos vices. Et de faire gagner la guerre aux boys partis en Irak, si possible. Bref, aux USA, le sexe, répétez après nous, « c’est tabou, on en viendra tous à bout » !

Outre son postulat de départ intriguant (une jeune adolescente découvre que son vagin a des dents), Teeth explore surtout la conscience d’une jeunesse déboussolée, qui ne sait plus vraiment à quel saint (sein ?) se vouer. Le mouvement des « first time », très populaire aux USA, prône ainsi l’abstinence jusqu’au mariage, et c’est avec un speech ahurissant de notre héroïne Dawn, apôtre du « no sex », que débute le film, après un prégénérique pour le moins étrange, mais qui annonce la couleur des événements à venir. Convaincue qu’il faut se réserver pour l’homme de sa vie, la jeune fille a pourtant des pulsions qu’elle ne peut réfréner, et ce qui devaitt arriver arrive, lors du premier rapport, avec force éclabloussures rougeâtres.

Humour gras et contractions castratrices

En dotant ce personnage, tiraillé entre sa nature et ses convictions, d’un outil littéralement castrateur (ouch !), Lichtenstein fait la plupart du temps mouche. Car l’argument est finalement plutôt comique, Dawn ayant des réactions à la fois horrifiées et ahuries en découvrant son intimité, avant de parvenir à dompter et maîtriser cette particularité. On se surprend à rire lorsque des médecins doivent « réinstaller » un appendice génital, et que le médecin chef déclare à la vue de la chose : « Hé bien, on dirait qu’il n’y a pas grand chose à recoudre pour ce garçon ». Vous avez dit humour noir ?

Pourtant, bien que l’intrigue soit plutôt rondement menée, le réalisateur pêche par une vision caricaturale de ses protagonistes : les mâles sont ainsi uniformément mauvais, queutards et menteurs, ce qui justifie a posteriori le fanatisme pourtant écoeurant des « first time ». Maladroit, et illogique, étant donné que Dawn elle-même prend conscience de ce fanatisme ! On se croirait donc parfois dans un tract pro-féministe à la Baise-moi, avec ses scènes émasculatoires ultra-réalistes, que les spectatrices pourront ponctuer d’un « C’est bien fait pour lui ! », mais mâtiné sur la fin de blagues pseudo-subversives qui tombent à plat. En d’autres termes, Teeth a le cul entre deux chaises, la provoc bon enfant et la métaphore sociale agressive. Pour son premier film, Lichtenstein n’est d’ailleurs pas en mesure de justifier par sa mise en scène ses parti  pris : passé un très beau générique, peu de séquences se démarquent d’un simple téléfilm, et le jeu étriqué des comédiens (y compris la crispante « révélation » du film, Jess Weixler) n’arrange rien.

S’il contient son petit lot de scènes appelées à passer à la postérité (autant le dire clairement, vous n’avez jamais vu des pénis dans ces états-là !), Teeth n’est pourtant pas aussi réjouissant qu’il auraît dû être. Après cette autre semi-déception qu’était Saved !, le film définitif sur la mentalité catholico-conservatrice de la middle class américaine reste à faire.
 

Titre original : Teeth

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Durée : 96 mn


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