Le frère jumeau de Federico est enterré au cimetière des ânes. Impossible en effet pour les habitants d’un couvent d’inhumer un prêtre suicidé en terre consacrée, et qui plus est un prêtre victime d’avoir été séduit par Benedetta, une nonne. Venu pour restaurer l’honneur de sa famille, et assister au procès en sorcellerie de Benedetta, Federico va à son tour succomber à ses charmes. Des siècles plus tard, la porte de l’ancien couvent-prison s’ouvre pour Federico, charlatan représentant un soi-disant milliardaire russe venu à Bobbio pour acheter le bâtiment. Mais il loge encore un mystérieux Comte sans âge, qui semble ne sortir qu’à la nuit tombée.
Au cours de son procès en sorcellerie, Benedetta passera, presque tranquillement, par les épreuves de l’eau, des larmes et du feu, décidés par des religieux dépositaires d’une tradition et d’une autorité séculaires condamnant la passion et par là, la vie. Elle finira emmurée vivante, deux fois prisonnière. Quelques siècles plus tard, le Comte qui est depuis le seul habitant de ces lieux, se présente comme l’éminence grise de Bobbio peuplé de Jonathan Harker version camisole de force. Parti se faire dévitaliser une canine chez un dentiste, ces deux amis dissertent sur l’évolution de la société et, chose nouvelle que les Nosferatu et autre Dracula ne nous avaient jamais dévoilé, les vampires sont, aussi, des vieux cons. Les jeunes qui font du bruit, les petits villages qui perdent leur identité, c’était mieux avant et aujourd’hui c’est la décadence. Forcément, lorsque l’on a (soi-disant) plusieurs siècles, assister au changement sans jamais changer soi-même peut entraîner la frustration ; sentir que l’on appartient à un monde voué à disparaître et que le nouveau se passe de vous, voire vous rejette, peut faire naître la tristesse. Cette sclérose, semble nous dire Bellochio, seules la jeunesse, la vie et la passion donc peuvent en venir à bout, et en briser les murs.
Il est dommage que plusieurs scènes émouvantes soient gâchées par l’usage d’une musique qui les tourne en dérision (Nothing else matters de Metallica repris par un choeur d’enfants, au secours), de même que l’on regrette que des scènes poussives de comédie, plus ridicules et embarrassantes que drôles, viennent encore déstabiliser le propos, nous perdant encore un peu plus. Alors même que nous nous étions déjà bien égarés.