Oh My God !

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Un joli conte de Noël pour promouvoir la vente des godemichés.

Qu’on se le dise… aux indécis ne sachant qu’offrir cette année à leurs amies, Oh my God ! préconise l’achat d’un vibromasseur. Un formidable engin qui procurera bonheur et santé en ces fêtes de fin d’année, un instrument d’utilité publique dont les multiples vertus nous sont vantées avec candeur par Tanya Wexler. Fort heureusement, car le sujet aurait pu facilement transformer cette comédie en grosse et graveleuse potacherie bien huileuse. Astucieuse, Tanya Wexler a trouvé l’argument de vente en béton armé le plus éloigné possible du porno : le féminisme. Plutôt courageux quand on sait le destin d’un mot hier révolutionnaire, aujourd’hui raillé comme la lèpre.

Au titre original du film, Hysteria, les distributeurs ont cru bon de privilégier le blasphème chic et bankable, au risque de camoufler la mine d’or déjà timidement explorée du scénario. Le godemiché a en effet été inventé pour calmer les nanas diagnostiquées comme hystériques, en somme, toutes les femmes bruyantes ou insatisfaites de leurs vies (1). Autant dire qu’à la fin du XIXe, sans le droit de vote, ni même celui de disposer de leurs propres corps, celles-ci devaient être légion. Mais, progrès de la médecine obligent, en 1883, suite à sa découverte du clitoris, le Dr Joseph Mortimer Granville invente le vibromasseur.

« La médecine anglaise est dangereuse pour la santé »

Comparé aux germes bactériens, ce clitoris avait au moins l’avantage d’être visible à l’œil nu, à l’heure où on soignait encore à coups de saignées. Tanya Wexler joue avec amusement du positivisme réactionnaire de l’époque, tout entier incarné en la personne de l’opalescente Emilie, épouse idéale, étudiante en phrénologie, et pianiste appliquée – mais toutefois médiocre – dont Mortimer tombe évidemment amoureux au premier coup d’œil jeté dans l’entrebâillement d’une porte. Il sera pourtant bien vite déstabilisé par sa sœur, la fantasque et volcanique Charlotte, sauvage utopiste et rebelle indécrottable. Les personnages sont archétypaux mais sympathiques, les décors, endimanchés mais soignés, l’intrigue, simpliste mais agréable. A notre grand étonnement, Oh my God ! pourrait ainsi concourir pour le prix de la comédie la plus télégénique et tous publics de l’année.
 
 

Cette joliesse occulte d’ailleurs un peu trop le potentiel critique d’un tel thème, rarement traité avec pertinence. D’où notre légère frustration face à un spectacle encore trop consensuel qui, même s’il évite de nombreux écueils, ne loupe pas celui de la « mal baisée » : suffirait-il à un mari de bien lui faire l’amour pour rendre sa femme définitivement heureuse ? Si c’était si simple, les suffragettes n’auraient pas eu besoin de descendre dans la rue. On exagère un peu, car malgré la naïveté aseptisée de son film, Tanya Wexler a le mérite de remettre gentiment sur le tapis un idéal social déformé par la caricature : le féminisme n’est pas une plaie, mais une conquête.

(1) Le diagnostic a été maintenu jusqu’en 1952 et regroupait mélancolie, colère, stress, irritabilité… à peu près tous les états possibles et imaginables en dehors du sourire béat.

Titre original : Hysteria

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Durée : 109 mn


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