Croire en ses rêves, ne jamais les perdre de vue : voilà le programme et la thèse de ce film-life coaching qu’est Le rôle de ma vie, pétri de bonnes intentions mais que l’absence totale de recul ou de cynisme fait plonger tout à fait. Aidan fait le tour des castings minables tandis que sa femme remplit des tableaux Excel dans un open-space propice au harcèlement sexuel (elle finance la famille, puisqu’elle soutient les rêves de son mari), que ses enfants deviennent “endoctrinés” dans une école juive privée financée par le père qui, justement, est en train de mourir d’un cancer et ne peut plus financer leur éducation. Le frère d’Aidan est un geek qui vit dans une caravane, ne parle plus à son père et ne rêve de rien sauf du Comic-con, où il pourra se déguiser en astronaute de comic et ainsi séduire sa voisine fan de peluches grandeur nature. Et voilà Aidan coincé entre ses rêves, ses responsabilités de père de famille et son rôle d’époux plus très sexy à force de végéter. Importance de la famille et du travail, nécessité de se frotter à l’existence, Le rôle de ma vie enfile les perles de bout en bout dans des scènes pas drôles quand elles ne sont pas gênantes – Kate Hudson expliquant à son beau-père mourant qu’il ne faut pas passer à côté de l’occasion de dire à ses fils qu’il les aime.
Il y avait pourtant une ou deux bonnes idées, malheureusement sous-exploitées : le versant geek du film, notamment, aurait pu faire une base assez solide. En partant de jeux de rôles où, enfants, Aidan et son frère s’imaginaient super-héros, Braff intègre à plusieurs reprises des séquences oniriques où, déguisé en personnage Marvel, il tente de se dépétrer des pires situations de la vie en les imaginant comme dans un comic. Belle idée de l’éternel ado coincé dans un corps adulte, où la prise de responsabilité se trouve oblitérée par l’envie d’ailleurs : mais Braff ne la suit jamais jusqu’au bout, ratant systématiquement tout ce qu’il voulait énoncer. La faute à un scénario bancal et des dialogues mal écrits, et une morale qui, nappée sous l’ironisation de la religion (interminables scènes chez le rabbin ou à l’école juive), est finalement bien conservatrice. Ainsi de la femme qui ne retrouve sa libido que quand elle voit enfin en son mari un père fonctionnel, ou du frère fâché comme tout qui se rendra tout de même sur le lit de mort de son père (si si la famille). Le pire, c’est qu’après avoir assené tout du long l’importance de croire en ses rêves, le film se clôt sur l’idée que l’accomplissement de soi n’est possible que par une vie bien rangée. On a les rêves qu’on peut.