Ça commence comme La Dernière marche, pour finir comme La Couleur des sentiments mais qu’on aurait retourné, ôtant le côté feel good pour ne garder que le sordide. Un homme est condamné à mort (Cusack), il aurait tué un shérif du comté. Autour de son cas s’affairent les deux fils d’un magnat de la presse (McConaughey et Efron), un rédacteur black et une beauté locale (Kidman), cheap et trop maquillée pour son âge, tombée amoureuse par missives interposées de l’accusé. Ensemble, ils vont tenter de prouver son innocence.
Intéressant de voir comme Paperboy déploie d’abord tout un champ de références au cinéma de genre, avant d’en prendre le contre-pied pour raconter plutôt l’histoire d’un jeune homme de 20 ans épris d’une femme trop vieille pour lui, pas exactement élégante mais de laquelle il ne peut pas détacher les yeux. Nicole Kidman est parfaite dans ce rôle-là, elle sait jouer la vulgarité sans verser dans le scabreux, et ose un certain nombre de séquences réussies parce que gênantes, et qu’on n’attendait pas du tout, comme celle où elle mène Cusack et elle-même à l’orgasme rien qu’en ouvrant les jambes devant l’ensemble des personnes venues rendre visite à l’accusé en prison. « Faire l’amour est la chose la plus naturelle du monde », dit-elle à Zac Efron qui, à force de persuasion, arrivera plus tard à ses fins. Dans une époque où le sexe ne saurait se faire hors mariage, Paperboy devient aussi l’histoire de premières fois.

Ce n’est pas très grave, puisqu’il s’agissait surtout de mettre les comédiens là où n’a pas l’habitude de les voir. De ce point de vue-là, c’est vraiment réussi, et plutôt convaincant. Sans rien dévoiler, une scène témoigne de la singularité de Paperboy : à mi-film, on retrouve McConaughey ensanglanté, nu, pieds et poings liés par du matériel sado-maso. Il est en fait homosexuel, c’était suggéré sans être dit, il aime les « nègres », a du mal avec ça. Ce n’est pas le moindre retournement d’un film qui, à défaut d’enchanter, ménage des surprises dans à peu près chaque plan.
Paperboy est donc comme ça, faux polar en zone humide, vraie galerie de personnages décomplexés aux mœurs viciées. On n’en dira pas plus, si ce n’est que Lee Daniels s’est fait plaisir, et qu’on ne déteste pas voir Barbie (Kidman) et Ken (McConaughey/Efron) méchamment violentés.

Quoi qu’il en soit, les deux films vus aujourd’hui présentent encore deux mondes différents, deux visions bien distinctes de faire du cinéma et de l’envisager. C’est pour ça qu’on vient à Cannes, pour ça qu’on reste. Ce soir, le nouveau film de Sergei Loznitsa, qui avait intrigué fin 2010 avec My Joy. Cette fois, ça s’appelle Dans la Brume, et ça parle de collaboration dans la forêt russe durant la Seconde Guerre mondiale. Un grand moment de décontraction, assurément.
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Festival de Cannes 2012 – Jour 2 : Les amours contrariées
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