DVD « Et si on vivait tous ensemble ? »

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La sortie en DVD du film de Stéphane Robelin est l´occasion de revenir de manière succincte sur les différentes figures de la vieillesse au cinéma et voir comment cette comédie sociologique amène une nouvelle perspective dans ce traitement.

Aborder la vieillesse au cinéma n’est pas nouveau. Si l’on passe rapidement en revue les représentations communes des seniors dans le septième art, on trouve d’abord la figure du vieux sage. Elle foisonne dans nombre de films fantastiques grands publics, Le Seigneur des anneaux et Harry Potter en tête. Ils représentent alors le savoir, la sagesse, et sont en général des figures de maîtres. D’autres « vieux » au cinéma, en faisant l’objet de caricatures grossières en sont devenues inoubliables, comme la célèbre Tatie Danielle d’Etienne Chatiliez, qui prend un malin plaisir à dépeindre une vieille femme acariâtre, appliquée à détruire la vie de sa famille. Dans ces deux cas, la figure de la personne âgée est fantasmée, quoique…

Constat plus récent, les films dépeignant la vieillesse comme un parcours initiatique pour arriver sereinement à la dernière étape de la vie. Ceux-là présentent le plus souvent les personnes âgées comme ultra-lucides sur leur vie, racontant avec un regard critique et sévère le chemin qu’elles ont parcouru, souvent d’ailleurs dans le but de se réconcilier avec un membre de leur famille ou avec elles-mêmes. Ingmar Bergman avait ouvert la voie avec Les Fraises sauvages. Il y filme un médecin retraçant sa vie, ses souvenirs, ses regrets avec calme et sérénité. Plus récemment, on pense aux Invasions barbares de Denys Arcand, ou dans un autre registre à Big Fish de Tim Burton, affichant un même point de départ : la figure du père malade, le fils fâché depuis des années avec le mourant, qui arrive à son chevet. Commence alors le récit telle une confession du père à son fils dans l’espoir d’une réconciliation. Tim Burton choisit pour traitement l’onirisme, une vie imagée pour échapper au spectre de la mort, alors que Denys Arcand filme la maladie de front, la souffrance et la lutte contre cette dernière avec beaucoup d’humour. Enfin, d’autres cinéastes, à l’image de ce que David Lynch a réalisé avec son très joli Une histoire vraie, présentent la personne âgée à l’orée d’une nouvelle vie, d’une nouvelle perception.

Une nouvelle vision du troisième âge

Et si on vivait tous ensemble ? apporte une nouvelle vision du troisième âge, en prenant le sujet sous l’angle de la comédie sociologique. En effet, dans le film de Stéphane Robelin, les seniors sont présentés comme des « jeunes ». Certes, la maladie les touche, la mémoire de l’un lui fait défaut, le cœur de l’autre s’emballe et le corps de la dernière se sait condamné. Mais, au lieu de s’appesantir sur la mort, le film traite avant tout de l’amitié forte qui lie depuis quarante ans ces cinq amis qui décident de vivre en communauté. Le parallèle avec les colocations estudiantines est facile. Ce film aurait d’ailleurs pu être très réussi, s’il ne manquait pas d’inventivité dans sa mise en images. Effectivement, l’unique intérêt de Et si on vivait tous ensemble ? est le jeu des acteurs, Claude Rich et Jane Fonda en tête. Tous acceptent d’être confrontés à leur rapport avec l’âge et incarnent avec humour et subtilité leur personnage, notamment en posant la question de la sexualité chez les personnes âgées : Claude (Rich) côtoie les prostitués et prend du viagra, Jeanne (Fonda) discute masturbation. Alors que chaque acteur est parfaitement à sa place, la mise en scène est diablement modeste, voire passe-partout. La réalisation manque d’audace et la mise en abîme du thésard allemand en immersion dans cette communauté de « vieux » est plus que grossière.

Reste que ce film aborde la vieillesse sous un angle plutôt nouveau. Il présente les séniors comme des « adolescents », sous la métaphore de la colloc’, n’ayant aucun tabou et ne s’appesantissant pas sur la mort (le seul moment du film où la maladie et la mort pourraient devenir importantes est expédié en deux scènes très courtes). Le nouvel angle que prend Et si on vivait tous ensemble ? est sans doute lié à l’évolution de la vision du troisième âge de notre société. Il prouve de manière certaine, que les cinéastes n’auront jamais fait le tour de la question de la vieillesse au cinéma et qu’ils ont encore bien d’autres propositions à nous faire.


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