Semaine un peu nostalgique, si l’on se rappelle qu’il y a exactement deux ans, sortaient le même jour les précédents films de Jacques Doillon (Le premier venu) et de Fabien Onteniente (Disco), que nous défendions sans rougir. Comme sortent aujourd’hui (hasard ? coïncidence ? effet Lelouch ?) leurs derniers films respectifs, à savoir Le mariage à trois et ce donc très attendu (?) Camping 2. Ne serait-ce cette étrange et notable « synchronisation » des calendriers, il n’y aurait bien sûr – c’est heureux – aucune raison d’aborder ces deux œuvres à égalité. Car en effet, quelle que soit notre déception face au Mariage à trois, celle-ci repose avant tout sur l’interrogation d’un système aussi rodé que ponctuellement asphyxiant. L’interrogation d’un style, d’une proposition, d’une signature d’« auteur ». Là où le constat de l’absolue nullité de Camping 2 éclaire juste davantage quant aux motifs de notre défense – sincère – de Disco.
Disco, qui reste à ce jour – et pour toujours, qui sait – le meilleur film d’Onteniente, bénéficiait disons d’un potentiel de stimulation visuelle principalement lié à son sujet d’élection : l’improbable mais bien réelle émancipation sur la piste de danse de corps étrangers à la séduction, l’accomplissement érotique d’un trio de beaufs longtemps indésirable. Ce qui sauvait le film, permettait surtout d’accorder pour cette fois le bénéfice du doute à Onteniente, en ce qui concerne son regard prétendument condescendant sur le monde qu’il brossait, était cette promesse d’un au-delà du ras-des pâquerettes, d’un envol final des éternels tocards. Tocards qui hélas, dans Camping déjà, mais surtout dans Camping 2 n’ont d’autre perspective que celle de l’exhibition de leur part la plus obstinément « anti-glam ». Patrick Chirac (Franck Dubosc, manifestement ravi de retrouver marcel rose et slip de bain marine – avec quelques motifs en plus, histoire de marquer quand même le coup) et sa bande nous reviennent ainsi tels qu’abandonnés il y a quatre ans, franchouillards et ravis de l’être.
Si demeure l’évidence que ces gens-là sont bien ceux qu’aime Onteniente, ceux qu’il veut défendre contre vents et marées (très basses, quand même, les marées) face au snobisme parisien, à l’intelligentsia, la critique, l’élite et tutti quanti, perdure un souci, et pas des moindres : pourquoi adopter un médium que visiblement il ne connait pas – dans tous les cas n’aime pas suffisamment pour élaborer ne serait-ce qu’un embryon de dramaturgie – pour exprimer cette infaillible fidélité ? Camping 2, cinématographiquement parlant ? RAS. Tout juste peut-on dire que si la complicité des acteurs ne fait aucun doute, si l’union de cette fine équipe est équivalente à celle animant mollement les campeurs du film pour la préservation des Flots Bleus face à l’oppresseur capitaliste, celle-ci ne suffit pas à faire pardonner l’insurmontable complaisance du résultat.
S’affirme surtout violemment la confusion sur laquelle reposent décidément nombre de nos comédies populaires, dont les têtes pensantes (pas moins de quatre auteurs dans la team de dialoguistes de Camping bis, mine de rien !) omettent quasi systématiquement de réfléchir la structure en terme de « mise en scène » plutôt que de simple écriture. D’autant qu’au niveau de l’écriture, justement, ce n’est vraiment pas ça, l’ensemble des gags, situations et jeux de mots n’étant que les fruits d’une forme d’ « auto-maniérisme », d’une paresseuse et vaine recherche de connivence avec les fans du premier opus.
Un dernier mot pour Richard Anconina, bon acteur sous-employé méritant tellement mieux que de jouer les faire-valoir d’un Dubosc franchement envahissant (trop dans son élément, sans doute… ) : ce n’est pas encore aujourd’hui que La vérité si je mens 2 – rare exemple récent de suite de comédie française ayant une vraie raison d’être – trouvera une digne concurrence.