Voyage à Yoshiro

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Esotérique et écolo, ce voyage tourne un peu en rond.

Une plante nommée Vision

Pour son treizième long-métrage, Naomi Kawase quitte la romance et l’optimisme pour se lancer dans un drame sentimental un peu compliqué qui se passe dans les forêts nippones habitées d’âmes errantes, de combattants, d’animaux domestiques et de souvenirs. Surtout de souvenirs, ceux fantasmés ou réels de l’héroïne française, interprétée par une Juliette Binoche encore plus terne que d’habitude, mais apparemment ravie de se trouver au cœur du mystère de la vie et de la nature. Le film, que tous les journaux auront pitché sans vergogne, se résume en quelques mots à peine : Jeanne part pour le Japon, à la recherche d’une plante médicinale rare qu’on appelle Vision qui donne son titre anglais au film et qui a du sens, puisqu’elle agit sur la perception et fait percevoir la beauté du monde et la force qui nous sauvera du chaos. Mais il faut y croire, et Jeanne ne cesse bien sûr d’y croire comme en un exorcisme. Lors de ce voyage, elle fait la connaissance de Tomo, un garde forestier, qui l’accompagne dans sa quête et la guide sur les traces de son passé. Il y a vingt ans, dans la forêt de Yoshino, Jeanne a vécu son premier amour.

 

 

Une nature à l’écoute du cœur

Cette plante rare, entre mousse et champignon, ne pousse que tous les cent ans environ, après des mesures alchimistiques qui auraient donné des migraines à Paracelse lui-même. D’ailleurs, pour bien montrer que Jeanne est une savante, on la voit souvent griffonner et dessiner des plantes aux formes moyenâgeuses. Elle est surtout accompagnée d’une traductrice française d’origine japonaise, qui s’éclipse au premier tiers du film pour aller visiter sa grand-mère. Mais foin de petit chaperon rouge, le film se noie dans une soupe romantique qui marie de façon compliquée présent, passé et futur, en mélangeant les genres jusqu’à perdre tout son sens et tout son sel. On a d’ailleurs du mal à croire en ces personnages, et pas seulement Juliette Binoche catapultée ici sans doute pour les besoins du casting, mais même Masatoshi Nagase, qui était splendide dans Vers la lumière en 2018 ou Les Délices de Tokyo en 2016, ne donne pas l’impression de croire en son personnage, il faut dire assez artificiel, tout comme Kazuko Shirakawa, éblouissante dans Vers la lumière, et ici méconnaissable en grand-mère aveugle et cependant visionnaire.

 

 

Le chien comme métaphore

Peut-être parce qu’il mériterait d’être vu deux fois, on peut toutefois accorder au film une grande valeur chromatique, car les paysages sont magnifiques et bien traités, de même que cette vie sauvage qui sourd de tous les côtés pour évoquer à la fois le mystère du don et celui de la passation des pouvoirs et de la vie. Est-ce pour cette raison aussi que le film ne se donne pas si facilement et qu’il demeure comme une énigme tant sur le plan de la symbolique que sur la nature de l’amour qui relie tous ces êtres au cœur d’une nature frêle et puissante, dont le chien est comme l’emblème et la métaphore.

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Durée : 107 mn


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