The Wild one

Article écrit par

Un documentaire habité et foisonnant sur un grand du cinéma et de l’Actors studio.

Enfant des Carpates, survivant de la Shoah

Le titre s’est imposé de lui-même parce que, justement, il rend bien compte du caractère bien trempé du réalisateur, formateur, professeur à l’Actors studio, rescapé de la Shoah, Jack Garfein, avec en plus une allusion à deux de ses films restés méconnus jusqu’à présent, The Strange One (1957) et Something Wild (1961), « qui ont été censurés, quand leur distribution n’était pas sabordée, précise la réalisatrice dans le dossier de presse du film. C’est aussi, bien sûr, le titre d’un film avec Marlon Brando, autre personnage central de l’Actors Studio, qui décrivait, dans une phrase désormais devenue célèbre, le jeu de l’acteur comme un « mécanisme de survie » ». Orson Welles quant à lui avait dit fort justement que si Jack Garfein n’avait pas existé, Hollywood l’aurait inventé. Une manière habile de dire qu’il fut indispensable, lui cet expatrié juif, réfugié aux États-Unis, juste après avoir quitté les camps de la mort et qui va marquer de manière durable l’histoire du cinéma mondial. 

Une réalisatrice et productrice talentueuse

Quant à la réalisatrice du film, elle n’en est pas à son coup d’essai. Tessa Louise-Salomé est scénariste, réalisatrice et productrice. Elle fait ses débuts en tant qu’assistante à la mise en scène – notamment auprès de Xavier Beauvois – et monteuse. En 2006, elle crée Petite Maison Production avec la productrice et réalisatrice Chantal Perrin : documentaires, fictions, films d’art ainsi que l’élaboration de ses propres réalisations. Ses projets personnels s’orientent vers l’observation du processus créatif. Après Drive in Holy Motors (2013), un documentaire sur la naissance du film de Leos Carax, elle réalise son premier long-métrage documentaire, Mr. X, le Cinéma de Leos Carax (2014), une incursion dans l’univers étrange du réalisateur français, sélectionné en compétition au festival de Sundance. Elle réalise par la suite le documentaire Il était une fois…Mommy (2017), sur le film de Xavier Dolan, dans la collection Un film, une époque pour Arte, puis elle produit Illegal Love (2011), film sur l’activisme en faveur des droits des homosexuels (Queer Palm au Festival de Cannes 2012), ainsi que le film de Nicolas Premier The Tears that Touch the Sun (2022) sur l’héritage colonial européen. 

Multiples facettes et William Dafoe

Beau palmarès, elle n’arrive donc pas en débutante lorsque, il y a sept ans, une des productrices de Wes Anderson lui fait rencontrer Jack Garfein qui occupe alors un poste de professeur à Paris. Le tournage va alors commencer entre images d’archives, entretiens avec le réalisateur menés au Marlene Dietrich Halle dans les studios Babelsberg à Postdam, près de Berlin. Malheureusement la mort de Jack Garfein va l’obliger à s’adapter et à changer de méthode pour son documentaire. « J’ai tout de suite été frappée par sa personnalité aux multiples facettes, sa passion absolue pour le théâtre et les acteurs, mais surtout par son histoire à la fois épique et dramatique, trop singulière pour ne pas être filmée, déclare-t-elle dans le dossier de presse. Une vraie pelote de laine à démêler, composée de fils qui traversent l’histoire du vingtième siècle – la Shoah, le Rêve Américain, le cinéma hollywoodien, le théâtre contemporain –, mêlés à d’autres motifs plus personnels comme son désir de liberté et son acharnement à dénoncer l’abus de pouvoir. » Un magnétisme incroyable, une vie digne d’un roman d’aventure, une pensée puissante, un travail de metteur en scène et de réalisateur précurseur, tout cela se sent d’un bout à l’autre du film qui, en plus, grâce à la voix puissante et habitée de William Dafoe qui dit les commentaires off, tisse à la fois un portrait en filigrane du cinéma américain grâce à des extraits et de l’Actors Studio en général. 

 

Titre original : The Wild one

Réalisateur :

Acteurs :

Genre :

Pays :

Durée : 94 mn


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi