C’est dans cette période charnière de l’histoire israélienne que Shirel Amitaï choisit de situer son premier long métrage. Cali (Géraldine Nakache), Asia (Judith Chemla) et Darel (Yaël Abecassis) sont de retour à Atlit pour vendre la maison familiale, héritage de leurs parents décédés. Vider la maison, nettoyer le jardin, organiser les visites, chaque étape est une occasion de s’engueuler, rendue encore plus compliquée par l’apparition des parents, bien décidés eux aussi à avoir leur mot à dire. Trois sœurs et un domaine empli de souvenirs, bons ou mauvais, qu’il faut pourtant vendre… La réalisatrice nous livrerait-elle une relecture inavouée des œuvres de Tchekhov ? Non, pas vraiment. Même si, comme Lioubov, Darel pourrait, elle aussi, s’écrier « sans la Cerisaie je ne comprends pas ma propre vie et, s’il faut vraiment vendre, qu’on me vende avec le jardin… », mais la mélancolie subtile du dramaturge russe est absente de Rendez-vous à Atlit.
Si l’on se fie à la note d’intention de la réalisatrice, l’originalité du film tiendrait à l’irruption du fantastique dans la vie réelle ; un fantastique concret qui fait des revenants des êtres en chair et en os, visibles des vivants et pouvant interagir avec eux. Mais attention ! Ce ne sont pas des fantômes, c’est « l’invisible ». Le refoulé, l’inconscient, le passé. Concrètement, ce sont les parents décédés (représentant une idée du sionisme) et un enfant palestinien, cheveu sur la soupe pour cocher la case « faire référence au conflit ». En vérité, le film ne tire pas sa force du fantastique mais bel et bien du réel. Réentendre Rabin, réentendre qu’à une époque la paix était possible au Proche-Orient mais qu’un homme l’a tuée, laissant tout un pays dans un état de sidération (une bonne idée du film), proche d’une post-apocalypse façon Walking Dead.
Un peu d’espoir ne fait jamais de mal, un peu d’optimisme et de fraternité non plus mais il est possible d’aborder tous ces sujets (et celui de l’héritage, et celui du partage) sans avoir besoin de l’énoncer à chaque fin de phrase.