Portrait de femmes chinoises

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Grand Prix au festival des Films de Femmes de Créteil, ce film chinois de 2008 atteste, si cela était nécessaire, de la vigueur du cinéma chinois.

Il semblerait maintenant que le seul cinéma innovant soit celui des pays émergents, on ne le répétera pas assez : il faudrait que le cinéma français se secoue et sorte un peu des diktats de la production s’il veut rester le premier cinéma mondial. Mais ça urge, quand on voit que la jeune Yin Lichuan, diplômée d’ailleurs de l’ESEC, célèbre école parisienne, département cinéma, nous offre un deuxième long métrage qui décoiffe. Juste après Gong Yuan en 2006, que je n’ai hélas pas vu, elle nous propose ce Portrait de femmes chinoises entre néoréalisme, ironie et amertume. Toute une société se dessine dans ce film de 100 minutes. Variety la reconnaît comme l’une des plus attractives jeunes réalisatrices chinoises, et on pense qu’il pourrait avoir raison.

Tourné à Quangzhou dans le Sud de la Chine, voici un film profond et tendre qui montre bien les problèmes de la société chinoise, entre misère et système D dangereux, qui n’oublie pourtant pas une certaine psychologie des personnages. La jeune Daping et son compagnon Chen Jin vivent au cœur de la métropole. Forcés l’un et l’autre de quitter la campagne, ils sont réunis par la solitude et vivent dans des conditions difficiles, ce qui a créé des liens forts entre eux. Lorsque surgit la belle Haili, que Chen Jin a connu dans le passé, c’est toute leur vie qui bascule. Haili veut oublier sa vie rurale pour profiter pleinement de ce que la ville peut lui offrir. Elle entraîne alors Chen Jin dans une combine, sous le regard impuissant de Daping. Daping est présentée à la fois comme une victime, mais aussi une jeune fille pugnace qui sait résister à la vie et saura rester fidèle à ses amours et ses amitiés. Sorte de Gelsomina chinoise, elle apporte à son personnage une vivacité incroyable et l’actrice Zhang Yi l’incarne d’une manière parfaite. Il faut d’ailleurs voir le dynamisme et la force vitale de ces deux femmes rivales traverser les épreuves de la vie sans perdre ni leur beauté, ni leur optimisme. Près de basculer dans le pathos, ce film résiste et se révèle un petit bijou qu’il va falloir courir voir même si sa date de sortie coïncide plutôt avec les bains de mer qu’avec les macérations dans les salles du Quartier Latin, mais sait-on jamais…

Les trois protagonistes du film sont excellents : en effet, hormis Zhang Yi, Yan Bingyan et le jeune homme fort courtisé, Lu Yulai, sont criants de vérité. Elodie Leroy, sur www.filmsactu.com donne, me semble-t-il, une excellent analyse du film lorsqu’elle écrit : « Comme pour souligner le caractère restreint des perspectives qui s’offrent aux personnages, la réalisatrice Lin Yichuan privilégie les espaces clos et étroits, l’essentiel de l’action se déroulant à l’intérieur même de l’appartement dans lequel vivent Daiping, Haili et Chen Jin. En plus d’être un drame social poignant, Portrait de Femmes Chinoises met en scène un ménage à trois dont la dynamique réserve des surprises jusqu’à la dernière séquence, le dénouement allant à ce titre à l’encontre des poncifs sur les rivalités féminines que l’on nous sert habituellement. »

Pas étonnant donc qu’il ait obtenu le Grand Prix à Créteil, certainement parce qu’il donne une image à la fois réaliste et sincère de la féminité.

Titre original : Niu Lang Zhi Nu

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Durée : 100 mn


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