Un conte allégorique qui se déroule au milieu du conflit syrien à Damas, à propos d’une famille qui décide de rester dans la zone assiégée. Lorsqu’un obus fait un trou géant dans le toit de l’immeuble où vivent Zeina, 14 ans, et sa famille, ces derniers sont soudainement exposés au monde extérieur. Un jour, un jeune garçon, Amer, vivant à proximité, se présente à l’ouverture du toit de la famille : Zeina découvre alors son premier goût de liberté, voire une amorce vers l’inconnu. Alors que son père est déterminé à rester chez lui et à ne pas devenir un réfugié, cette nouvelle fenêtre ouvre un monde inimaginable de possibilités pour elle et sa mère qui sont maintenant confrontées au dilemme de rester ou de partir.
Zeina (Hala Zein), 14 ans, ses parents – sa mère Hala (Kinda Aloush) et son père Motaz (Samir al Masri)- font partie des derniers habitants d’un quartier déchiré par la guerre. Le titre du long-métrage signifie « le déplacement de l’âme, de l’eau et des gens », mais Motaz refuse de devenir un autre réfugié bien que rester devienne dangereux. Au début du film, Hala se soumet passivement à l’autorité de Motaz, tandis que l’esprit imaginatif et créatif de Zeina indique qu’elle pense et ressent différemment d’autrui. Dans une scène marquante visuellement et auditivement, une bombe est larguée sur la maison, provoquant un trou dans le plafond de la chambre de Zeina et apportant une lumière devenant métaphorique dans un édifice auparavant dans l’ombre. L’imagination de Zeina transforme le ciel bleu clair en un lac sur lequel elle peut effleurer des pierres.
Amer (Nizar Alani), un garçon voisin et cinéaste en herbe, laisse tomber une corde dans sa chambre et montre à Zeina un film qu’il est en train de faire – « un film sur la Syrie où personne ne meurt ». Amer représente finalement un autre type d’homme syrien, opposé au père, qui pourrait offrir un peu d’espoir. Le film d’Amer comprend des plans de la mer, principal symbole de liberté de Nezouh.
Zeina – qui a vraisemblablement assisté à la disparition de ses amis, à la destruction de son quartier et de son enfance en général, semble être restée totalement insensible et semble implacablement joyeuse. Elle est peut-être dans le déni, mais le scénario ne le suggère jamais. (Zeina elle-même peut être un autre symbole, de la seule attitude stoïcienne à l’égard de la vie qui permettra aux gens de traverser ces cauchemars.)
Nezouh comporte des instants touchants au-delà du réalisme affiché. Dans une transition de scène très subtile, un pigeon vole, accompagné par le son du marteau de Motaz. Celui-ci, dans une autre scène plutôt pathétique, reste assis affalé sur son fauteuil alors que la pluie se déverse sur lui par le trou dans le toit : image de la fragilité de celui qui a vu toute sa vie dévastée par la guerre. Zeina, à un autre moment, lui indique qu’il ne sait pas tenir une arme alors qu’il joue le matamore-défenseur de sa famille. D’autres détails abondent, comme lorsque Hala reproche, ironie frappante, à Zeina d’avoir laissé tomber des décombres par la fenêtre de cette zone bombardée, au cas où cela blesserait quelqu’un. Les images blanchies par le soleil (superbe travail sur la photographie) de Damas anéantie que Zeina et Hala traversent transmettent toute l’horreur cauchemardesque de ce que la guerre a fait à la ville. Film sur la guerre, Nezouh demeure un film d’espoir. Soudade Kaadan réussit l’exploit d’imbriquer documentaire, poésie, voire féérie, avec une subtilité remarquable que les acteurs incarnent avec bonheur.