Le Dernier Vol

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Adaptation plus ou moins réussie du roman de Sylvain Estibal, « Le Dernier Vol de Lancaster », ce long-métrage de Karim Dridi nous embarque dans le Sahara pour une marche longue, très longue…

1933. Un homme, une femme, une armée, des chameaux, un désert. Mélangez le tout et vous obtenez Le Dernier Vol, une aventure dans le Sahara, entre l’Algérie et le Niger, avec deux têtes d’affiche, Marion Cotillard et Guillaume Canet.

Marie Vallières de Beaumont est aviatrice. De l’Europe à l’Asie, aucun ciel ne lui a résisté. Sa force, son courage et son optimisme, elle les doit à son seul amour, Bill Lancaster, lui aussi célèbre aviateur. Seulement voilà, il s’est écrasé en plein désert lors de son vol Londres-Le Cap, dans le Ténéré. Sans aucune hésitation et malgré le désaccord de son père, Marie décide de s’envoler vers cette zone aride pour tenter de le retrouver. Venue chercher de l’aide auprès du capitaine Vincent Brosseau (Guillaume Marquet), chef d’un camp de méharistes français en guerre contre les touaregs, elle ne récolte que de la séduction et le droit de séjourner à leurs côtés.

Parmi eux, le bel Antoine, la barbe de l’aventurier, le militaire moitié français moitié touareg, contre l’autorité et montrant son anticolonialisme. Il parle, il négocie, il frappe… rien n’y fait : les combattants français lèvent le camp et s’embarquent dans le désert pour affronter les touaregs qui refusent d’être « civilisés ».

Marion Cotillard est d’une extrême beauté dans ce film, les yeux bleus à demi fermés à cause d’un vent de sable puissant, la tenue d’aviatrice quasiment taillée sur ses hanches, ses boucles virevoltant dans tous les sens. Dans ce rôle d’obstinée de l’amour, on la retrouve en Edith Piaf attendant son amant à Paris ou en Sophie dans Jeux d’enfants – avec Guillaume Canet il y a 6 ans –, déterminée et joueuse. Seulement, les répliques manquent d’originalité, de fougue, de vérité. Guillaume Canet pour sa part incarne très bien son personnage de sentinelle du désert, dans un arabe presque parfait, et dans un jeu de séduction involontaire. Bien que n’étant pas le premier choix du réalisateur, ce rôle semble avoir été taillé sur mesure pour lui.

Mais malgré des acteurs sensibles et touchants, des paysages à couper le souffle, des silences bien choisis, une intimité ressentie, le film manque désespérément d’action, d’aventure, de mouvement. Tout comme le désert, l’histoire est infinie, on se perd dans cette aventure qui n’en est pas une, on devine la suite de l’histoire : on s’ennuie. Très loin d’un Out of Africa ou d’un Patient anglais, l’histoire d’amour, que se soit entre Marie et Lancaster ou entre Marie et Antoine, ne donne pas envie d’aimer mais au contraire lance un appel à la raison sentimentale. Marion Cotillard avait promis au réalisateur de faire ce film… c’est donc chose faite – avec son compagnon à la ville. Reste qu’au vu du résultat, le paysage était plus sans doute plus propice à une publicité de luxe – mais que fait Dior ? – qu’à un long-métrage…

Titre original : Le Dernier Vol

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Durée : 94 mn


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