C’est justement ce que Jan Schomburg nous propose de découvrir, ainsi que d’observer le mécanisme qui a conduit Martha à combler le vide laissé par un double improvisé. On efface tout et on recommence donc, sauf qu’Alexander ne l’entend pas de cette manière. Et nous non plus. Les béances s’élargissent au film et contaminent tout le scénario. Qu’on ne creuse pas plus loin le délire mythomane et dépressif de Paul pour mieux se concentrer sur l’effet qu’il produit sur Martha, passe encore. Seulement, pour donner une caution psychologique à son tout premier film, le réalisateur s’appuie essentiellement sur le jeu plutôt convaincant de son actrice, Sandra Hüller, abondamment récompensée dans les festivals. Ça ne suffit pas. Le film, relativement court – quatre-vingt huit minutes – et elliptique, semble avoir été composé à peu près comme sa bande-annonce : « un couple uni, une séparation, une nouvelle rencontre ». Et… ? C’est tout.
On salue l’initiative, toutefois avortée sur la longueur, de rejouer certaines scènes pour amener l’écho troublant. Idem, Jan Schomburg a l’audace de représenter le deuil et la mort avec une rare crudité lorsque Martha va assister au nettoyage du corps. Malheureusement, toutes ces tentatives restent vaines, affaiblies par un sujet superficiellement brossé, tari par cette structure trop légère en regard d’un thème gigogne invoquant tout à la fois fantômes, deuil insurmontable, mensonges, délires, rapports de couple, impossibilité de l’amour idéal… et qu’on attendait plus densément dessiné. Alors qu’il devait plutôt insuffler une bouffée d’air frais optimiste, le happy end sorti brutalement du chapeau vient au contraire appuyer notre frustration, faute d’avoir été préparés en amont. C’est dommage. On aurait bien aimé y croire : à leur bonheur comme à leur mal-être.