Hors de prix

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Trois ans auparavant, Pierre Salvadori nous offrait la comédie Après vous. Aujourd´hui, il revient avec une comédie romantique servie par le duo Audrey Tautou et Gad Elmaleh. Côté comédie, le réalisateur ne réussit qu´à nous faire sourire, légèrement. Côté romance, le sujet est prometteur. Jean, serveur timide dans un hôtel de luxe, apparaît, par un […]

Trois ans auparavant, Pierre Salvadori nous offrait la comédie Après vous. Aujourd´hui, il revient avec une comédie romantique servie par le duo Audrey Tautou et Gad Elmaleh. Côté comédie, le réalisateur ne réussit qu´à nous faire sourire, légèrement. Côté romance, le sujet est prometteur. Jean, serveur timide dans un hôtel de luxe, apparaît, par un quiproquo involontaire, comme un milliardaire aux yeux de la jeune et ravissante Irène, dame de compagnie pour homme fortuné. Une fois le subterfuge découvert, elle fuit Jean au plus vite préférant offrir son coeur à un véritable prince. Il faut bien comprendre ici que le prince n´intéressera la belle que s´il est fortuné. L´histoire pourrait s´arrêter là mais c´est sans compter la persévérance et le charme du crapaud qui, à défaut d´argent, va tenter de reconquérir la belle. Qui va-t-elle choisir ? Prince ou crapaud ? De l´argent ou de l´amour, lequel triomphera ? Voilà le gros problème de ce film : on devine la fin dès le début.

Hors de prix enchaîne les clichés qui se suivent et se ressemblent. Il l´aime, il la suit. Elle l´aime et le fuit. Ils s´aiment et s´enfuient. Une pièce de 1 euro va parcourir le récit rappelant au spectateur où en sont les deux personnages au niveau personnel, dans leurs sentiments. Cette métaphore qui file jusqu´à la fin, Pierre Salvadori la qualifie d´ << image expressive >>, formule qu´il emprunte à Lubitsch. Mais ce symbole n´est pas assez subtil, comme si le réalisateur, désireux de faire passer un message au spectateur, l´inscrivait en gros caractères au milieu de l´écran. Quant à la phrase récurrente << j´aimerais...je voudrais... >>, elle parcourt tout le récit ayant la même signification que la pièce, au cas où le spectateur n´aurait pas compris.

Hors de prix, sur certains points reste plaisant. D´abord, le côté burlesque que l´on retrouve avec plaisir dans le personnage de Jean à qui Gad Elmaleh prête corps et mouvements. La scène d´ouverture sur Jean promenant les chiens de clients de l´hôtel est assez spectaculaire car l´on s´interroge : va-t-il tomber ou est-il en train de danser au milieu des laisses ? Ce côté burlesque, très << Keatonnien >>, est quasi omniprésent chez Jean lui donnant un véritable décalage traduit par son inadaptation. Une fois dans le grand monde, en temps qu´homme de compagnie, il ne sait pas s´habiller << comme il faut >>, conserve son côté naturel qui surprend dans ce milieu et garde ses réflexes de serveur (lorsqu´il entend quelqu´un appeler << garçon ! >>, il se lève aussitôt).

L´intérêt se trouve surtout dans le message qu´il véhicule. Hors de prix est un film sur l’asservissement en somme. Ici, les plus riches sont en mesure de posséder des gens, de les acheter. Jean et Irène ne sont plus les maîtres de leurs vies. Ils existent par et pour d´autres personnes qu´eux-mêmes. Qu´il s´agisse de Jacques, Yves ou Madeleine, ce sont eux qui disposent de Jean et Irène. Mais en ce qui concerne Jean, Madeleine ne réussira jamais à le posséder réellement car il est Hors de Prix, même pour une femme comme elle. Ce sujet sur l´asservissement, l´appartenance à autrui, aurait mérité un plus grand intérêt de la part du réalisateur ainsi que dans la mise en scène. Le thème est très intéressant mais ne reste malheureusement qu´au second plan, loin derrière l´histoire d´amour qui tisse sa toile entre Jean et Irène ; histoire d´amour certes pleine de rebondissements mais sans surprise aucune.

Titre original : Hors de prix

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Durée : 103 mn


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