Une histoire sans fin
Le début est pourtant prometteur : par petites touches, la mise en scène révèle la relation fusionnelle entre la mère et son enfant, puis par pudeur relègue les circonstances du décès dans le hors-champ. Ce moment de grâce cinématographique qui rappelle, toutes proportions gardées, L’Incompris (1966), le chef d’œuvre de Luigi Comencini, n’est malheureusement qu’éphémère. Par la suite, tout se passe comme si Bellocchio ne croyait pas à la force narrative des ellipses, et ne souhaitait pas s’en remettre à l’intelligence du spectateur pour saisir les enjeux axiologiques d’un tel drame. La souffrance de l’enfant, son désarroi donnent lieu à de longues scènes explicites et répétitives. Une fois adulte, c’est au tour d’innombrables flashbacks de venir encombrer le récit. Et ce, sous prétexte de fournir des explications psychologiques aux angoisses du quadragénaire, à l’instar des scènes de cauchemars hantés par le fantôme de Belphégor. De même, il faudra attendre une interminable scène de catharsis pour que la vérité sur la mort de la mère nous soit enfin révélée.
Une représentation trop appuyée
Les interprétations des deux Massimo (enfant et adulte) contribuent également à alourdir la démonstration. Alors que le jeune Nicolò Cabras pêche par un trop plein d’expressivité lors des scènes de révolte, Valerio Mastandrea, quant à lui, tombe dans l’excès inverse. La lourde et silencieuse tristesse qui habite en permanence le visage et la démarche de l’homme génère davantage la lassitude que la compassion. Pour dépeindre les relations humaines, le récit ne recule devant aucun poncif. Ainsi, pour traduire l’impuissance de la religion face au malheur de l’enfant, Bellocchio a recours à des figures cléricales distantes et sévères. La passion du football est présentée comme unique vecteur de communication entre un fils et un père italiens. Quant à l’amour salvateur, c’est suite à une providence des plus improbables qu’il se présentera, sous les traits d’une jeune doctoresse française (Bérénice Bejo), la même qui lui aura sauvé la vie auparavant par téléphone. De peur de ne pas réussir à atteindre notre corde sensible, Bellocchio ne laisse jamais son récit respirer et nous prive ainsi de toute émotion sincère.