Effets d’annonce

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Alors que beaucoup de films se cachent aujourd’hui derrière leur trailer « Twixt » s’offre nu.

" Tu as vu le trailer du dernier film de … ? " On demande pour la forme car on sait très bien que tout le monde l’a vu. On demande juste pour en parler un peu. Les critiques et les cinéphilies ont aujourd’hui si bien digéré Internet qu’une bande-annonce (ou trailer) peut devenir l’évènement cinéma d’une semaine sans que personne ne s’en étonne. Avant l’explosive bande-annonce de Prometheus il y avait son teaser présenté par Ridley Scott himself – sorte de bande-annonce de la bande-annonce. Même démarche du côté du Cosmopolis de David Cronenberg et de ses trente secondes visibles depuis trois semaines partout sur le net. Avant le film, le film est déjà là et ses images se répandent. On a presque déjà vu le dernier bébé de Wes Anderson tant la bande-annonce de Moonrise Kingdom bégaye des souvenirs (acteurs, musique, lumière…) ; on n’a pas envie de voir Le prénom et on attend mollement Bilbo le Hobbit comme si tout était déjà plié dès les premières images que l’on nous donne à voir. On se laisse aguicher, on se laisse vendre des films comme on se laisserait vendre n’importe quel autre produit et on achète ou on n’achète pas. Les riffs de guitare qui rythmaient la bande-annonce dHors Satan donnaient une énergie folle aux images de Bruno Dumont. Plus tard l’énergie est toujours là mais impossible de retrouver le thème dans le film lui même, ce dernier n’étant accompagné d’aucune musique. C’est de bonne guerre.
 
Si la dernière bande-annonce de Twixt a été raccourcie pour sa sortie française et remontée pour la rendre plus pêchue, il reste que le dernier film de Francis Ford Coppola est lui une curiosité depuis les premiers instants. Twixt sort cette semaine en salles mais son premier long trailer (3mn36s) visible depuis août 2011 a déjà crée une certaine intimité entre lui et nous. Anti-spectaculaire au possible, la bande-annonce du dernier long-métrage du cinéaste culte a déjà commencé à le faire vivre bien avant toute projection comme un objet à part. " Terrible trailer!!! Usualy trailer is better than movie… " ; " I feel like i just watched the whole movie " ; " The movie looks kind of boring ". Les premiers commentaires sous la vidéo du trailer mise en ligne il y a huit mois sur Youtube (vu près de 400 000 fois depuis) plus encore que d’illustrer une déception témoignent du décalage entre ce que le public attend encore aujourd’hui d’un cinéaste comme Francis Ford Coppola et ce que ce dernier lui chuchote à l’oreille. Depuis trois films le réalisateur américain semble suicider tout son cinéma pour recommencer ailleurs, autrement, une deuxième carrière. Les coûts sont réduits, les tournages se font à l’étranger et après L’homme sans âge et Tetro, Twixt paraît vivre de la même recherche d’intimité ; comme si Francis Ford Coppola se faisait le plus petit possible pour donner à son film une chance de vivre un peu sans lui. La première bande-annonce de 2011 présente le film comme il est vraiment, sans tricherie, comme si rien n’importait si ce n’est ce qui a été filmé. Parmi ses plus grands films se trouvent bon nombre de monstres intimidants – même blessé, Le Parrain III en reste l’un de ses plus beaux représentants. A l’opposé, L’homme sans âge et Tetro se laissent voir simplement, comme déconnectés de l’Œuvre qui les a précédés. Ce regard neuf qui caractérise les années 2000 du cinéaste Twixt l’appelle également très fort et son prochain film sera peut-être, une nouvelle fois, son premier.


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