« Attention, ça va piquer » crie Jenny à son fiancé, poursuivi, torturé par une bande de jeunes et désormais à l’agonie. Le maquillage aidant, cette réplique prête à rire. Pourtant Eden Lake, premier film de James Watkins (scénariste de Gone et The descent 2), n’inclue pas la farce potache en costumes débraillés et rouge sang. Eden Lake rentre dans le nouveau courant des Hoodie Horror, film mettant en scène la délinquance et la recrudescence de la violence – chez les jeunes mineurs le plus souvent, par lesquelles l’Angleterre est le premier pays touché.
Et les personnages satellites extra-diégétiques ? Ils sont tout simplement relégués à une absence et un refus d’aide pour sauver Jenny. Alors qu’elle tente d’appeler la police depuis le téléphone portable d’un jeune « spectateur », Jenny ne peut les joindre. Devenant ainsi le porte-parole d’une population anglaise pétrifiée, le réalisateur s’esclaffe discrètement de l’ineptie des forces de l’ordre.
La métaphore du théâtre amplifie le mélange entre vie en péril et jeu sadique des délinquants, entre réalisme et fiction. Les personnages, filmés dans des plans aériens, sont réduits aux pions d’un jeu sans fin et aliénant. D’ailleurs, la dénouement est en cela éloquent : Jenny retourna à la case départ, c’est-à dire dans la maison du leader meurtrier, invité par mégarde par Steve. Les ficelles étant certes un peu lourdes, le réalisateur ne manque pas d’inclure le cercle vicieux de la violence.
Face à ce cycle social, que reste-t-il de l’horreur, du genre dans sa forme ? Rappelons avant tout que Jenny est institutrice. Cela peut paraître superflu, mais résonne au cours du film alors que s’impressionnent des plans aériens suivant la voiture du couple sur une route unique, bordée de part et d’autre par la forêt. Indéniablement, les images identiques de Shining s’interposent à celles d’Eden Lake qui -au grand dam des rebondissements dramatiques- se perpétuent, renvoyant clin d’oeil sur clin d’oeil au maître Kubrick. L’exemple le plus concret se tient dans une problématique superposition de courses entre Steve et un jeune voyou. Copiant la poursuite de Jack Torrance et de Danny à travers le labyrinthe enneigé, le montage rapide d’Eden Lake échoue dans l’expression de la surprise. On voit surgir Jenny à la place du jeune. Pourquoi ? Comment ? Mystère.
Peu importe la pondération (maquillage digne d’un mort vivant échappé d’un Romero) et la cohérence, ce ne sont pas les maîtres mots d’Eden Lake. En bon élève, James Watkins sort son guide de l’horreur et ajoute un atout vériste pour donner une touche de contemporanéité. Cette dernière offre l’unique plus value de ce film, malgré tout sans frisson ni surprise.