Le film traite de la relation délicate entre un père et un fils, Eliezer et Uriel Shkolnik, qui exercent tous deux la même profession : chercheurs sur le Talmud et enseignants universitaires. Deux manières différentes de vivre la même vocation. Et puis il y a le Prix d’Israël, que le père attend depuis toujours. Sur un malentendu, alors que le ministère croit appeler Uriel (le fils) pour lui annoncer qu’il est le gagnant du prix, il téléphone en réalité à Eliezer (le père), lequel voit un des rêves de sa vie prendre forme devant lui. La reconnaissance qu’il a attendue pendant de si longues années arrive enfin. Le fils se retrouve alors face à un véritable dilemme : obéir au malentendu qui couronnera Eliezer et lui interdira, à lui, toute nouvelle candidature au Prix d’Israël, ou accepter ce signe de reconnaissance que lui décerne la profession, en sachant très bien que son père aura beaucoup de mal à s’en remettre.
Malgré la tension, à la fois familiale et sociale, qui règne entre les deux hommes, il n’y a jamais de conflit. Le film ne manque pas de profondeur, la rivalité entre Eliezer et Uriel étant aboutie, bien travaillée. Et c’est dans la non-confrontation que les choses s’avèrent les plus significatives. Le père et le fils sont individualisés, l’un se trouvant toujours dans le hors-champ de l’autre. Ils possèdent tous deux une certaine épaisseur mais nous paraissent à de nombreux moments plus légers qu’ils n’en ont l’air de prime abord, grâce notamment à un recours à l’ironie et, par là même, à la distanciation. Le quiproquo social et psychologique pourrait être beaucoup plus lourd mais est ici détourné par le comportement des personnages. Que le film ne soit pas joué tel une comédie est l’aspect le plus réussi : des pointes d’humour ça et là, se faufilant entre des interprétations subtiles. Le spectateur semble placé dans une situation délicate qui consiste à se demander, de façon indirecte, s’il peut se placer d’un côté ou de l’autre tant la mise en scène prend le temps de traiter Eliezer et Uriel un à un en alternance, de les isoler l’un de l’autre. La mise à distance entre les personnages et le spectateur fait qu’on ne s’attache pas vraiment à eux, qu’on ne s’y identifie pas. Ces champs-contrechamps qui n’ont jamais lieu entre eux deux nous permet de voir la situation avec beaucoup de recul et d’en rire. Eliezer et Uriel ne sont pas loin des tragédiens grecs ou des héros shakespeariens.
Le film vaut le détour mais, dommage, l’édition DVD de Footnote ne propose pas de bonus.
Footnote de Joseph Cedar – DVD édité par Blaq Out – Sortie le 16 octobre 2012