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Des hommes dans l´espace, un inspecteur en charge du surnaturel et l´éternel Fantômas… L´Ina sort le fantastique français de ses réserves !

Les caisses de l’Ina sont bien pleines, ce qui fait que pas mal de leurs éditions DVD fleurent bon l’événement. Après le coffret « Les grandes fictions de la télévision » l’an passé, c’est une nouvelle série consacrée au fantastique français que lance l’institution et qui permet de découvrir ou redécouvrir aujourd’hui quelques pépites des fictions produites pour la télévision des années 1960 aux années 1980 peu ou pas diffusées.

Les réjouissances commencent avec Le Navire étoile d’Alain Boudet, le premier film de fiction produit par la télévision française diffusé le 11 décembre 1962. En pleine conquête de l’espace, la TV aussi se devait d’envoyer ses spectateurs dans les airs. Mais au cas où celui-ci se sente dépassé par ce que lui proposait son poste, un brève présentation-explication du film (présente sur le dvd) avait été prévue. Adapté du roman d’Edwin Charles Tubb, Le Navire étoile descend en droite ligne des grandes heures de la SF littéraire. Huis clos infernal, le film montre une vision du futur bien sombre : les hommes ont déserté la Terre après un cataclysme nucléaire et 2000 survivants vivent dans un vaisseau, dirigés par une machine super-évoluée, Psycho, qui décide du destin de chacun. L’homme est dominé et asservi jusqu’à ce qu’un maillon de la chaîne se dérègle. Un homme commence à poser des questions et enraye le fonctionnement de Psycho. Avare en effets spéciaux, La Navire étoile vaut surtout pour sa vision ultra-datée du futur entre minimaliste et mode des sixties. Très bavard, souvent drôle, le film entretient aujourd’hui des liens savoureux avec ses lointains cousins 2001, l’Odyssée de l’espace (l’ordinateur fait loi) et Wall-E (les hommes ayant déserté la planète pour vivre en orbite).

 

Le Navire étoile, Alain Boudet (1962)
 
Les aventures fantastiques se poursuivent avec les très loufoques aventures de La Brigade des maléfices (1970). Cette mini-série de six épisodes d’un peu moins d’une heure chacun met en scène l’inspecteur Guillaume-Martin Paumier (Léo Campion) et son fidèle Albert (Marc Lamole), spécialistes des phénomènes paranormaux à qui l’inspecteur principal de police (le formidable Jacques François) fait appel quand les situations le dépassent. Souvent donc ! Nos compères pourchassent au fil des épisodes des fées passionnées, le diable (Pierre Brasseur) déguisé en producteur d’émissions expérimentales pour la TV ou en directeur de magasin d’électroménager (le bien nommé M.F. S.T.O.), un vampire amoureux de sa dentiste ou encore un fantôme qui ne rêve que de vivre dans le confort moderne d’un HLM. Au travers des enquêtes de Paumier, le réalisateur Claude Guillemot et le scénariste et critique Claude-Jean Philippe font la part belle aux méchants d’envergure comique et à l’observation des travers de leurs contemporains : fascination pour la modernité, maris volages, crimes passionnels, machisme et escroqueries en tout genre. L’ultime épisode, l’hilarant Fantôme du HLM, est un procès en règle contre la politique de grands travaux des années 1960 – fantômes et problèmes immobilier semblent être un sujet de prédilection pour ces années comme le montre aussi le beau Fantômes à Rome d’Antonio Pietrangeli. Si en plus Annie Duperey nous apparaît sous les traits d’une enchanteresse habitante de Vénus, on ne peut qu’être conquis.

 

  
La Brigade des maléfices: Voir Vénus et mourir & Le Fantôme du HLM, Claude Guillemot (1970)

Pour couronner cette première salves d’éditions fantastiques, un raté de l’énorme production chabrolienne : une énième adaptation, franco-allemande, de Fantômas en quatre épisodes de 1979, deux réalisés par Chabrol lui-même et deux confiés à Juan Luis Buñuel (fils de Luis Buñuel). Fantômas, à l’allure d’un vieux moucheron, est incarné par Helmut Berger, souvent vu chez Visconti (Les Damnés, Ludwig…). La série hésite entre le sérieux de la version muette de Louis Feuillade et la franche farce de l’irremplaçable Louis de Funès pour atteindre un résultat pas franchement glorieux mais qui revêt le plaisir coupable du bon nanar et annonce presque le futur Inspecteur Lavardin des années 1980 (Poulet au vinaigre, Inspecteur Lavardin et Les Dossiers secrets de l’inspecteur Lavardin de Chabrol). On oscille donc entre répétition lassante de l’incrédulité autour de l’existence de Fantômas, citations lettrées mais malicieuses (le premier épisode L’Echafaud magique évoque la première du Chien andalou de Luis Buñuel avec cette phrase : « C’était surréaliste. Mon dieu, pourquoi pas ! ») et franche rigolade avec le coutumier humour potache de Chabrol avide de déguisements grotesques ou d’incorrections en tous genres. Le meilleur moment est ainsi sans doute une scène d’interrogatoire d’un suspect sourd sur les lieux d’un crime. On croisera au détour des épisodes de brèves apparitions de Jean-Pierre Coffe et du jeune Fabrice Luchini. Pas très bon certes, mais un joli plaisir inavouable.

 

Fantômas, Claude Chabrol & Juan Luis Buñuel (1979)
 
Restez éveillés, l’Ina nous promet pour sa seconde salve un coffret Jules Vernes (Les Indes noires, Le Secret de Wilhelm Storitz et L’Île mystérieuse), Tout Spliques étaient les Borogoves et la série La Poupée sanglante. Comme quoi, la télé (des années 1970) n’a pas fini de nous étonner…


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