Au rayon des grosses bestioles qui font préférer les pédiluves aux étendues d’eau naturelles, il y a les requins évidemment, les piranhas, les orques plus rarement, et les alligators. Pour s’être déjà attaqué aux petits poissons avides de chairs étudiantes, il n’était pas illogique qu’Alexandre Aja s’intéresse à une autre histoire de prédateurs aquatiques. C’est le producteur Craig Flores qui propose le pitch de home invasion saurien au réalisateur français qui l’accepte, à la condition de l’étoffer un peu. Et comme on le comprend : les frères Rasmussen, responsables du scénario de The Ward, à l’écriture…ça n’inspire pas confiance. Gregory Levasseur, éternel acolyte d’Aja, est bien sûr de la partie comme coproducteur aux côtés de Sam Raimi, soit un trio plutôt rassurant quant à l’efficacité du film.
Hayley (Kaya Scodelario), étudiante et nageuse dans l’équipe universitaire, part à la recherche de son père, injoignable alors qu’un ouragan de force 5 se profile au-dessus de la Floride. En plus de son père, Hayley retrouvera également les alligators échappés de la réserve proche. Le vent souffle, l’eau monte, et tout le monde nage pour manger ou éviter de l’être.
Un film catastrophe banal mais plaisant
Mélange entre home invasion et film catastrophe, Crawl suit un chemin balisé qui ne réserve pas beaucoup de place à la surprise. La faute peut-être à des personnages tellement durs à cuire qu’ils en deviennent caricaturaux si bien qu’aucun doute n’est permis quant à leur survie ; fracture ouverte, morsure de croco, looping en apnée prolongée et amputation improvisée, rien ne peut ralentir Hayley et son père. L’horreur doit sans doute aussi être vécue par les alligators qui déchiquètent policiers et passants en deux claquements de mâchoires mais ne viennent pas à bout de deux individus coincés dans un sous-sol. Qui ne sont pourtant pas avares en décisions absurdes pour se jeter dans la gueule du loup, le plus sérieusement du monde. Tout le côté rigolard et potache de Piranha 3D est absent de Crawl qui ne nous épargne même pas la séquence émotion/pardon/non c’est moi.
Heureusement, Aja sait faire et le film reste efficace pendant ses 1h30, prenant un plaisir pervers à jouer avec les nerfs de ses personnages en les ramenant systématiquement à leur point de départ. Le réalisateur se concentre sur la survie et a la bonne idée de ne pas s’égarer dans des récits secondaires inutiles ; le film suit sa ligne directrice sans fioritures en s’offrant quelques plans un peu gores pas déplaisants. Partie animatronique, patrie effets spéciaux, les alligators du film sont une menace crédible qui se déplace dans l’espace de manière furtive à l’instar d’un Alien avec qui ces animaux partagent d’ailleurs une capacité reproductrice importante. Dommage que la maison et les distances, notamment dans le sous-sol, ne soit pas rendues plus précisément afin d’ajouter au suspense et à la tension ressentie par le spectateur.
A l’arrivée, Crawl fait le boulot : offrir 1h30 de divertissement en mettant deux personnages dans la pire des situations possibles pour se réjouir de ne pas être à leur place.