Cornélius, le meunier hurlant

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Adaptation du roman étrange d’Arto Paasilinna, le premier long métrage de Yann Le Quellec est une réussite qui arrive à marier l´humour, la gravité et la poésie.

Un équipe réunie pour étonner

Pour son premier long métrage, après des courts comme Je sens le béat qui monte en moi  (2012) et Le Quepa sur la Vilni ! (en 2013), Yann Le Quellec, ancien producteur et dirigeant des Sofica Cinémage, a choisi d’adapter à l’écran le roman très célèbre du Finlandais Arto Paasilinna, dont le titre sera aussi celui du film. Il a décidé pour ce faire de s’entourer d’une équipe prestigieuse avec des acteurs chevronnés tels Anaïs Demoustier, Gustave Kervern ou encore Denis Lavant, pour ne citer que ceux-là. Il a aussi obtenu le concours dans le domaine chorégraphique de Maguy Marin, Rachid Ouram-dane, Rosalba Torres Gerrero et Koen Augustijnen, et comme directeur de la photographie de Sébastien Buchmann – sans oublier pour la musique de générique et de fin d’Iggy Pop en personne, après qu’il a entendu son interprétation en français des Passantes de Georges Brassens. Cherchant pour le rôle principal du meunier hurlant une figure dans le style de Gérard Depardieu jeune, il découvre et nous offre un acteur étonnant en la personne de Bonaventure Gacon, jeune homme venu du cirque qui n’avait jamais fait de cinéma jusqu’alors et qui se révèle vraiment épatant.

 

Film pensé et construit

Voici donc un film pensé, construit et profond mais aussi d’une grande poésie même si elle peut paraître maladroite et quelque peu naïve au premier abord. On ne peut ensuite que tomber sous le charme d’un film magique, qui décrit un monde intemporel où les gestes du quotidien retrouvent le sens qu’ils ont perdu de nos jours, comme par exemple moudre le blé afin d’ obtenir une farine qui fera le meilleur pain du monde. Echoué dans un village qui n’a pas de meunier, Cornélius va s’y installer. Adoubé par le maire, celui-ci lui cédera un terrain escarpé pour qu’il y construise son moulin. Puis, peu à peu, tout le monde le maudira parce que la nuit il hurle son mal de vivre et sa terreur dans toute la vallée. Mais c’était sans compter sur la force de l’amour, mais aussi sur le destin funeste.

Un conte intemporel

 
Sous des dehors de conte, le livre et, par conséquent le film de Yann Le Quellec, se présentent comme une fable moderne sur la solitude et la destinée. Hormis les acteurs dont nous avons dit un mot et qui sont prodigieux, le réalisateur est parvenu à mettre en avant des décors naturels de toute beauté comme le village du Cirque de Navacelles, dans le Larzac, mais aussi le Causse de Blandas et la Forteresse de Salses – près de Perpignan -, qui marquait au XVème siècle la frontière entre la France et la Catalogne. En faisant de Cornélius une sorte de Don Quichotte aux prises avec la méchanceté et l’incompréhension humaines, Yann Le Quellec met en scène non seulement les hommes, la nature et sa beauté, mais aussi il invente des machines avec l’aide de Martin Wheeler qui s’inspire des plans de Léonard de Vinci avec des engrenages qui évoquent à la fois un monde intemporel mais aussi la modernité s’avançant pour broyer, à la manière du grain, les volontés et les rêves de l’humanité. Il y a du Chaplin des Temps modernes dans Cornélius, du Tati, mais aussi de l’absurde à la manière de Terry Gillian, beaucoup aussi du propre univers du réalisateur, avec un déploiement de situations souvent burlesques tout autant que tragiques auxquelles les acteurs donnent toute leur force, notamment Denis Lavant dans le rôle d’un médecin qui avoue que pour lui une forte consommation d’alcool lui permet d’oublier l’angoisse.

Un western dans une nature époustouflante

Avec ce film qui tient à la fois du western, du film écologiste, de la fable baignant dans un univers quasi-biblique que n’auraient renié ni Giono, ni Pagnol, Yann Le Quellec se sépare un peu de l’humour branché qu’on lui connaissait jusqu’alors pour entrer dans le sublime de la poésie universelle. Qui n’a jamais eu envie de crier comme un lycanthrope les nuits de pleine lune ? « J’ai lu Le Meunier hurlant, confie-t-il au dossier de presse, il y a une dizaine d’années et depuis, l’envie d’adapter ce roman à l’écran ne m’a pas quitté. On y plonge dans un univers foisonnant, picaresque, d’une immense liberté. Et très drôle. Un humour doux amer et burlesque souvent grinçant, sur un fil, mais d’une grande humanité et dénué de cynisme. » Son film a parfaitement respecté cet humour romanesque, et ce n’était pas joué d’avance.

Titre original : Cornélius, le meunier hurlant

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Durée : 107 mn


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