Boys Like Us

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Des Pieds nickelés attachants en villégiature à la montagne, entre burlesque et émotion.

Quand on se fait larguer chez Go Sport, un masque de plongée à la main, il y a de quoi se poser sérieusement des questions sur sa vie. Des questions qui vont pousser Rudolf (Florian Carove), ledit largué, à y apporter une réponse radicale : laisser tomber son appartement et son travail parisien pour repartir vivre dans son pays d’origine, l’Autriche. Un choc pour Nicolas (Jonathan Capdevielle) et Gabriel (Raphaël Bouvet), ses deux meilleurs amis, bien décidés à s’incruster dans ce déménagement transalpin aux allures de choc culturel. Entre randonnées bucoliques et discussions plus ou moins amicales, l’heure est venue pour les trois amis de commencer à faire le point sur leurs vies.

 

 

Si partir c’est mourir un peu, partir en Autriche c’est mourir d’ennui. En tout cas, aux yeux de Gabriel et Nicolas qui ne comprennent pas ce que leur ami peut bien trouver à ce coin perdu, bien loin de l’activité viennoise. Ce n’est pas la première fois que Patric Chiha s’intéresse à l’étrangeté de son pays d’origine, l’Autriche, et au fantasme du retour « chez soi », à la maison (Home, 2008). Ce deuxième long métrage, après Domaine en 2009, s’inscrit dans cette lignée. Serveurs habillés en costume tyrolien, galerie de personnages obsédés par la propreté, monomaniaques de l’organisation, enfants sages et bien élevés, l’Autriche de Boys Like Us a tout de la carte postale, et les Autrichiens tout du pire film de montagne qui soit. Une chose est sûre, c’est calme. Mais dans Shining (Stanley Kubrick, 1980), c’était calme aussi, comme le fait si bien remarquer Nicolas. Ce pays-là est un tel cliché, une impression accentuée par une palette de couleurs éclatantes, qu’il en devient absurde et donc potentiellement comique. Propulsés dans ces paysages à mille lieux de la vie parisienne, nos deux Français, sans cesse réprimandés par Rudolf, font figure d’éléphants dans un magasin de porcelaine. Un pays aussi bien rangé, ce serait dommage de ne pas le secouer un peu. Une course au lapin, un entretien à un poste de moniteur de tire-fesses, un petit déjeuner trop couleur locale, et le burlesque surgit par touches légères.

Inadaptés à ce nouvel environnement, perdus dans des plans larges, les trois amis ne se déplacent qu’en faisant des aller-retour, des zigzags, bref, tout ce qui s’éloigne le plus d’une ligne droite. Le retour aux sources c’est beau, mais c’est loin, et surtout, c’est une vue de l’esprit. Pauvres Rudolf, Nicolas et Gabriel dont les problèmes n’ont pas eu la patience d’attendre leurs propriétaires à Paris ; bien cachés dans les valises, ils ont décidé de faire le voyage eux aussi. Même en Autriche, Nicolas tente de draguer des hommes plus jeunes que lui, Gabriel court après le fantôme de son ex qu’il n’a pas réussi à exorciser après des années de psychothérapie tandis que Rudolf fantasme le lieu de son enfance qui lui apporterait forcément une réponse, croyant être plus à sa place ici que partout ailleurs. Une espérance à laquelle le réalisateur met ironiquement un point final au cours d’une visite dans la « maison » familiale.

 

Patric Chiha se moque gentiment de ces citadins catapultés en pleine nature loin du métro, de l’agitation parisienne et surtout loin de Grindr. Le fait qu’ils soient tous les trois homosexuels n’est ni un problème, ni un drame (le réalisateur s’autorisant à jouer avec les clichés liés à cette « orientation sexuelle » comme ils disent) mais être trentenaires et adultes, voilà le véritable souci. Ces trois-là ne se sont pas vus grandir et le séjour autrichien les rappellera plus ou moins brutalement à la réalité. Tout en leur disant que leur amitié reste un ancrage, plus fiable qu’un chez soi fantasmé.

Titre original : Boys Like Us

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Durée : 90 mn


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