Arrietty, le petit monde des chapardeurs chez p’tit Glénat

Article écrit par

L’adaptation illustrée du film entre les mains, retour sur le dernier film d’animation des studios Ghibli, Arrietty, le petit monde des chapardeurs.

Depuis Porco Rosso (1995) et Princesse Mononoke (2000) jusqu’au récent Ponyo sur la falaise (2009), Glénat a toujours relayé chacune des nouvelles sorties des studios Ghibli. Si le risque et la demande ne sont plus les mêmes qu’au milieu des années 1990 – en Occident le studio n’avait pas à l’époque l’aura qu’il possède aujourd’hui – , ces adaptations sur papiers des films des maîtres Miyazaki et Takahata (Pompoko), sont toujours réalisées avec le même soin et celle d’Arrietty, le petit monde des chapardeurs ne déroge pas à la règle. Ce livre est dédié aux plus petits mais même si on ne l’est plus depuis un moment, pour peu que l’on soit déjà allé voir le film en salle, c’est avec plaisir que l’on replonge une deuxième fois dans l’univers bien trop grand pour elle de la minuscule Arrietty.

Pour les enfants, le caractère « produit dérivé » dans ce qu’il a de plus négatif n’existe pas et l’univers proposé page après page ne pourra que les combler. Les personnages sont mignons à souhait et l’histoire semble désamorcée de toute méchanceté, de toute peur. Il ne faut pas chercher dans cette adaptation une once de violence ni l’idée même de conte initiatique – ce que n’est pas non plus totalement le film. Illustré des images du film, le livre gomme même les scènes les plus fortes, les plus étonnantes du film ; celles qui faisaient réagir dans la salle et autour desquelles s’articulaient toute la tension qui entourait Arrietty. Ainsi, le corbeau fonçant sur elle et se coinçant la tête dans une fenêtre, s’il est bien toujours présent, n’est plus aussi impressionnant. Tout passait à travers ses cris et sa vitesse et les images figées du livre n’arrivent pas à rendre la réussite de cette scène. La façon dont la petite Arrietty était la proie de la moindre bestiole – souris, chat… – n’existe quasiment plus dans la version papier. Dommage, car c’est sans doute sous cet angle-là que le film de Hiromasa Yonebayashi allait chercher ses plus beaux instants. Haru également, la femme de ménage qui œuvrait avec méchanceté contre Arrietty et sa famille n’est plus vraiment une menace une fois figée dans les pages du livre. Cruelle et sans cœur dans le film, elle n’est ici que grotesque, n’apparaissant presque qu’à travers des grimaces pathétiques et amusantes. Moins du fait de l’éditeur que du principe même de l’adaptation d’un film d’animation en livre, le caractère figée de l’histoire proposée là montre que l’animation est également vectrice d’émotions, de sensations et réflexions. Une fois cette animation stoppée, tout semble s’arrêter. Aussi belles que soient ses pages, le livre de Glénat, soigné, ne peut vivre sans le film.

Au texte très facile d’accès de cet ouvrage, on peut ainsi préférer celui dont s’est inspiré Miyasaki pour son scénario, The Borrowers de Mary Norton. Plus à même d’inviter au rêve en ne calquant pas émotions et narration sur des images et des couleurs pré-mâchées. Néanmoins, adulte, se pencher à nouveau sur Arrietty, le petit monde des chapardeurs à travers sa version papier, c’est aussi faire remonter des images avec lesquelles on a vécu ses dernières années. Dès la première page du livre, la première minute du film, on voit Chihiro dans la voiture de ses parents, attendant de vivre ; on voit les enfants de Totoro découvrant une nouvelle vie. Arrietty est tout ces personnages sur le point de grandir émotionnellement: Kiki et Ponyo ; Pazu et Sheeta qui grandiront  ensemble dans Le Château dans le ciel. Bancal dans Arrietty, le petit monde des chapardeurs, l’amour naissant entre la "petite personne" et le jeune enfant nous rappelle bien d’autres histoires. Comme trop souvent chez Ghibli, comme ça l’a déjà été remarqué à la sortie du film, même quand ce n’est pas Miyazaki, c’est bien lui.

Arrietty, le petit monde des chapardeurs, Editions Glénat, Collection "p’tit Glénat"


Partager:

Twitter Facebook

Lire aussi

Niki

Niki

Trois ans après son court-métrage Adami, « L’arche des Canopées », Céline Sallette revient à Cannes et nous confirme qu’elle fait un cinéma de la candeur.